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ÊTRE OU NE PAS ÊTRE…Quelques réflexions édifiantes sur nos attitudes – Icicemac

ÊTRE OU NE PAS ÊTRE…Quelques réflexions édifiantes sur nos attitudes

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J’ai décidé d’inaugurer ici un nouveau cycle de causeries sur des faits sociaux afin d’échanger ensemble sur les valeurs que nous entendons défendre, pour des sociétés plus aguerries face aux nouveaux défis que nous pose le monde moderne.

1re partie : EDIFIER AUTRE QUE MOI-MÊME
« Être ou ne pas être… Telle est la question » disait
Shakespeare à travers Hamlet. Partir de « qui vous êtes » à « qui vous choisissez d’être » est d’une profondeur philosophique inestimable. Mais il s’agit aussi de s’interroger sur « Être » ou choisir d’« être dans le paraître ». Cette dualité est le fondement des interrogations existentialistes.


Ces derniers jours, je n’ai pu m’empêcher d’avoir une réflexion connexe à l’issue de plusieurs observations :

  1. J’ai vu certains amis de ce même Facebook si prompts à se mettre en scène auprès de personnalités, riches hommes d’affaires ou stars, afin de se donner de l’importance qu’au lieu de me faire sourire, ce tropisme quasi pavlovien chez certains m’a donné à réfléchir
  2. Un ami virtuel m’a demandé où ma grande culture et ma grande érudition m’avaient mené, ce qui je dois l’avouer, témoigne d’un affaissement de la pensée dans certains cercles mercantiles au sein desquels seuls comptent l’apparence, les titres notabiliaires et l’épaisseur du compte en banque.
    Pour une fois, je commencerai par la fin. Par cette question d’apparence anodine, cette personne essayait de me faire savoir que je n’étais pas une personnalité suffisamment célèbre au sens où l’homme de la rue l’entend, à savoir une autorité morale, politique ou financière dont l’aura permet de drainer des foules innombrables. Passons ! Car je dois à la vérité de rappeler que cette personne, adepte des confréries révélées, ne voit l’univers qu’à travers le prisme d’un dogmatisme religieux qui obère toute faculté de réflexion critique, pouvant procurer une lueur de lucidité substantielle à sa pensée sclérosée.

DES RELIGIONS IMPORTEES
Doit-on donc avoir emprise sur les consciences pour compter aux yeux de certains de nos congénères ? La réflexion critique est l’apanage de l’homme nous dit-on. Cependant cette faculté qui est une donnée biologique naturelle chez l’homme est-elle unanimement partagée ?

Nous savons bien que par nos aptitudes inégales à l’instruction, à la cognition, nous ne sommes pas égaux devant les dons de Dieu, tout au moins en ce qui concerne à l’accès de tous à l’intellect. Ce postulat de départ est une réalité tangible car si nous pouvons développer des aptitudes dans tel ou tel domaine de la vie sociale, nous n’avons pas les mêmes capacités cognitives devant les mathématiques, les sciences naturelles ou la physique.

Certains sont plus doués dans les arts, d’autres dans les sports et certains dans les travaux manuels, ce qui n’est pas une dépréciation de leurs qualités intrinsèques ni un jugement de valeur, mais une réalité concrète. Nous devons d’ailleurs à Herbert SIMON, prix Nobel d’économie en 1978 le concept de rationalité limitée qui présuppose que les hommes ne sont pas égaux devant une situation quelconque et s’arrêtent toujours plus ou moins consciemment à la première solution satisfaisante, à cause de leur éducation, des limites de leur cognition et ne recherchent jamais la solution optimale ; ce qui l’amènera à considérer la rationalité procédurale comme solution à nos carences naturelles.


S’il est indispensable pour une meilleure intelligibilité de distinguer la croyance de la religion, il est aussi tout aussi objectif de constater que la religion a été de tout temps facteur de division car elle pose le postulat une vérité intangible et immuable à travers le temps et l’espace, ce qui est contraire à la science ainsi que le révèle Edouard Schuré dans « Les grands initiés ». Toute référence à l’église porte en substance l’empreinte de celui qui l’a énoncée alors qu’un énoncé scientifique se doit être détaché de la personne de l’énonciateur pour devenir universelle ; c’est le grand dilemme et le sempiternel clivage entre la parole (en substance) et son énonciateur, depuis des temps immémoriaux. Chaque fois que vous dites un verset de l’église, vous le rapportez de l’apôtre qui l’a énoncé. (Evangiles selon Jean Mathieu…).

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Si l’on convient que la foi est personnelle et se vit in vivo, il est difficile en conscience d’avoir une vérité univoque qui ne fasse l’objet d’interprétations, à moins qu’elle ne se manifeste par l’expérimentation, ce qui dans le cas de la religion est pour le moins difficile. Ce qui relève des faits sociaux est donc forcément sujet à interprétations et une parfaite connaissance livresque sied à une meilleure appréhension des textes qui sont le fondement idéologique ou philosophique de toute foi. Le problème est que bien souvent les pasteurs et autres prêcheurs devenus apôtres, se muent en donneurs de leçons, jusqu’au jour où ils sont démasqués.


Pour autant, doit-on rejeter la foi quelle qu’elle soit ? La réponse à cette question dépend de tout un chacun car en conscience, l’humain reste seul lié à la cosmogonie, en ceci que son sort déjà écrit ou co-construit relève d’abord d’une expérience personnelle et que tout intercesseur ne peut qu’être catalyseur prosélyte et co-effecteur d’une réalité biaisée.


J’ai donc fait comprendre à cette personne qu’une certaine altitude intellectuelle me semblait nécessaire à la compréhension de la théologie et qu’une grille de lecture théologico-philosophique était essentielle à l’intelligibilité des versets bibliques. Venir ânonner des versets bibliques ne fait pas de l’homme un érudit, mais un répétiteur, le réceptacle stérile d’une vérité essentielle que son déficit d’intellect peine à saisir.
Les premiers contempteurs (critiques) de l’Eglise furent des prélats tels que le père Jean Meslier (1664-1729), prêtre et philosophe des Lumières qui fut aux temps modernes parmi les premiers à dénoncer les contradictions de la bible. Les premiers explorateurs qui mirent les Africains en esclavage utilisaient cette même bible pour asservir les peuples qu’ils colonisaient.

Il suffit de lire la Bible Genèse 9 Versets 20-27 sur la malédiction de Cham pour s’en convaincre. Ce sont ces versets entre autres prétextes, qui légitimèrent la mise en esclavage des nègres durant 4 siècles.


Toute doctrine a une histoire. Pour y adhérer, il faut la connaître car elle nous enseigne le sens caché (le noumène) derrière le phénomène. Il faut en connaitre l’histoire pour choisir d’adhérer ou non. Très souvent, les contemporains, guidés par des considérations physiologiques, ou des problèmes quotidiens récurrents se jettent à corps perdus dans des doctrines venues d’ailleurs et en font le lit de leurs aspirations personnelles dans des temps de détresse. Repenser les fondements anthropologiques des théogonies me semble être une tâche à laquelle nous africains devront nous atteler afin de recoller nos existences superficialisées par de trop longues inféodations aux cultures exogènes. Nous devons nus y atteler afin de rebâtir nos rationalités métaphysiques sur des bases authentiques.


Je pense qu’en ma qualité d’intellectuel, professeur dans les universités et les grandes écoles, je me dois également de rappeler à certains que se croiser sur les réseaux sociaux ne signifie nullement que nos intellects se valent, mais simplement que nous sommes membres d’un collectif appelé « société » où chacun possède des aptitudes dans son domaine, mais que le bon sens implique de reconnaître la maîtrise de certains corpus à ceux qui en ont la parfaite connaissance. Il en est ainsi de l’histoire des religions par exemple.

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Avoir la foi n’exclut pas de disposer d’une grille de lecture critique, même si le fanatisme est très souvent consubstantiel d’un certain dogmatisme et d’une cécité elle-même facilitée par l’absence de discernement dans sa propre analyse tronquée.
Que l’on se comprenne bien, il ne s’agit pas ici d’une fustigation de la religion en tant que doctrine morale distillant une ensemble de préceptes moraux et d’enseignements éthiques, mais en tant que substrats univoques d’une lecture nouménale de l’essence humaine et de l’existence. Je ne suis pas athée moi-même mais j’ai ma propre spiritualité et surtout j’adhère au dogme sociétal de la laïcité. La laïcité suppute le postulat social d’une liberté absolue des consciences et en tant que telle, toutes les consciences se valent, qu’elles fussent croyantes ou non. Il ne saurait donc être question d’inféodation des croyants au diktat des mécréants ou des agnostiques. Mais la religion quand elle endosse le manteau de sa tentation prosélyte devient le cœur de la négation de l’autre, du gentil, de l’impie. En cela, elle devient néfaste et dangereuse pour le mieux-vivre ensemble. Quand elle prend la forme du dogme sociétal, elle devient pernicieuse et son intolérance, gangrène.


Telle fut en substance la raison de la crucifixion du Christ sous la pesanteur des rabbins de Jérusalem et de du règne temporel de Rome ainsi que du massacre des premiers chrétiens durant les 3 premiers siècles chrétiens ; mais tel fut aussi le sceau du sort des mécréants durant tout le moyen-âge chrétien sous le paravent de la sainte inquisition, bras séculaire de la religion catholique, ainsi qu’à travers les templiers à Jérusalem ainsi que le massacre des protestants lors des temps modernes. Ces protestants issus du schisme de la chrétienté qui fit aussi le lit de toutes sortes d’excroissances sous l’appellation d’églises révélées.
Elles poussent comme des champignons, écument les villes des capitales d’Afrique et essaiment partout où rampent les embryons larvaires de la misère humaine. La condition dépréciée de l’homme est le terreau fertile où prospèrent ces nouvelles idéologies, ces aspirations téléologiques au bonheur de l’humanité : Elles sont le nouvel opium des damnés de la terre.

2e PARTIE : ÊTRE OU PARAÎTRE ?
Pour revenir à tous ceux que je vois exhiber leurs photos auprès de personnalités…
Il est d’usage de dire que « qui se ressemble s’assemble » …En est-ce l’illustration mimétique en même temps que pathétique ? Le besoin de reconnaissance existe en chacun de nous, disait le psychosociologue. Mais alors, peut-on en déduire que « je côtoie tel donc j’ai réussi » ?

N ‘est-ce pas l’illustration symptomatique d’une aliénation qui peine à se dévoiler ? Il me semble que la véritable existence est celle qui s’affranchit du ruissellement, de l’analogie du même, de la dépigmentation par assimilation. Car, Exister, c’est aussi se distinguer. Or dans l’identification à l’autre, l’on se complait dans une forme de disparition de soi en lieu et place de l’autre dont on devient la pâle photocopie, l’ersatz, le succédané. Savoir exister, c’est exister par soi-même, c’est abdiquer d’être une persona (au sens du « masque » grec) pour devenir une personne et non un personnage : c’est renoncer à se faire chose. Sachez rester vous-même au lieu de vouloir ressembler à l’autre.

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Mais nous vivons une drôle d’époque où le paraitre a définitivement pris le pas sur l’être ! Le « J’apparais, donc je suis » semble être devenu la nouvelle dorsale de nos sociétés de la post modernité, anonymisantes par excellence, où l’on se démarque par des selfies, où l‘on existe par l’apparence. Alors, à ce jeu, s’exercent tous ceux par qui l’existence rime avec le paraitre, même dans les pires conditions de nos existences souvent misérables.
Il en ressort que l’être humain de ce début de millénaire, que l’on appellera « l’homo electronicus » est bel et bien devenu un homme superficiel qui ne règne sur le monde qu’en apparence et qui n’existe que comme tel. Il cherche à être vu, le plus souvent à son avantage, dans une quête effrénée vers la projection d’un « moi » surévalué, d’une image sans cesse bonifiée, d’une existence magnifiée, parfois aux antipodes de sa réalité intrinsèque. Cette société de l’apparence-reine est aussi une société du renoncement au sens, de la superficialité où la nature intrinsèque des choses cède la place au désir d’existence qui se mue en aspiration de vie.

La reconnaissance et le sens s’entremêlent dans une danse scabreuse vers le nanoscopique, renversant la superposition mazlowienne pour inverser les valeurs au confluent des égotismes.

La civilisation hybride vers laquelle nous nous dirigeons est une course infernale à la pollution visuelle, aisément facilitée par la digitalisation de nos modes de vie et jusqu’aux pans les plus intimes de nos existences. Il y a fort à parier que les générations d’après ne verront le monde qu’à l’aune de cette inversion des valeurs puisque de repères ils n’auront que cet étalage de la futilité, cette agrégation des insipidités, cette équation unique de l’optimum humain comme modèle d’humanité à copier, dans une lente mais inexorable disparition de l’altérité, de la société plurielle. Et d’envisager cette désagrégation civilisationnelle perturbe ma quiétude.

CETTE DERVIVE CIVILISATIONNELLE FAVORISE-T-ELLE LES VENDEUR D’ILLUSIONS ?
Et c’est ici que les 2 sujets de cette réflexion se rencontrent car ces 2 sujets relèvent les contradictions de nos modèles sociétaux qui se reflètent dans les modèles alternatifs que certaines églises prétendent incarner face à cette disparition des idéaux. Et pourtant les mêmes églises palliatives se servent de ces carences idéologiques pour prospérer. D’où l’importance d’un sursaut qualitatif des idéaux porteurs nos sociétés en lieu et place d’aliénations coupables qui transforment l’homme en un ectoplasme de superficialité qui, sans esprit critique, devient l’idéologie pernicieuse des marchands de morale religieuse.


Il devient donc impératif de réinventer nos rapports aux autres, retrouver les bases de la spiritualité africaine (en ce sens le Mbog chez les bassa, le Ngouon chez les Bamoun, le Ngondo chez les Sawa, etc…) sont les expressions criantes de la préexistence de ces sociétés initiatiques africaines à l’arrivée des religions occidentales en Afrique. Au grand carrefour des cultures monde, il faudra bien que la spiritualité africaine retrouve ses lettres de noblesse afin de réinventer son modèle civilisationnel et l’authenticité de son rapport au monde.

Prof. Henri Georges Minyem
Professeur en écoles d’ingénieurs/Enseignant à
l’université de Paris VII-Diderot
http://www.georgesminyem.com

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