Le Chef de l’Etat a procédé à un remaniement ministériel, et on peut légitimement supposer que ce remaniement vise à répondre à des événements conjoncturels dont les principaux sont les suivants :
1. La SECESSION ANGLOPHONE: les Anglophones sont venus au Cameroun sous la forme de la fédération. Celle-ci a été supprimée, à tort ou à raison, peu importe, mais on ne supprime jamais une Fédération. Les Anglophones estiment qu’il faut revenir sur ce système ou du moins, un système analogue qui leur ménage le droit de s’occuper de leurs affaires quotidiennes. A cela s‘ajoute, mais de manière subsidiaire, un sentiment de marginalisation dans la représentation au sommet de l’Etat centrale.
Le Chef de l’Etat a cru devoir répondre à ces exigences en accentuant le nombre de Ministres anglophones et en leur donnant 2 Ministères de souveraineté. Il a de plus créé un Ministère de la décentralisation.
Mais la question demeure : est-ce que ces mesures sont de nature à calmer des Sécessionnistes armés, convaincus de leur bon droit et assurés d’être dans une noble opération de libération de leur territoire occupée par les « forces étrangères » ?
A maintes reprises, j’ai dit qu’une sécession se combat avec les Etats régionaux. En répondant au problème anglophone par un Ministère de la Décentralisation prétendant en plus s’occuper du développement rural, le Gouvernement pense-t-il encore maîtriser toute la situation et pouvoir gérer son temps ? Ne voit-il pas que ce terrible Mouvement, à l’instar de ses analogues, ne peut que monter en force ?
2. La CRISE ECONOMIQUE : après 20 ans d’une terrible crise déclenchée en 1987, le pays a restauré ses équilibres macroéconomiques en 2006 à la suite des sacrifices épouvantables. Une occasion en or qui a été dilapidée au travers d’une gestion sous-préfectorale et autiste, où les décrets, les prescriptions et les instructions de la hiérarchie tenaient lieu de lois économiques. La conséquence ? Un déficit courant abyssal poussant à un endettement accéléré, une trésorerie vide et un pays sous ajustement.
Comme en politique, le Cameroun demande une réforme générale de son cadre macroéconomique. D’où la question : qu’est-ce que la permutation d’ALAMINE avec MOTAZE peut apporter de significatif dans une crise aussi profonde ?
3. Des ENGAGEMENTS INSTANTS : le Cameroun s’est embourbé de manière désordonnée dans des engagements qu’il est radicalement incapable d’assumer. Et sitôt que les salaires sont payés et les montants pour soutenir les guerres multiples décaissés, il n’y a plus rien dans le Trésor. Le pays n’est même plus capable de répondre aux exigences les plus élémentaires comme la prise en charge des enseignants recrutés il y a plus de 5 ans.
Pendant ce temps, des échéances importantes menacent, comme la CAN qui frappe à la porte, avec le risque d’une humiliante expatriation, les multiples élections, sans compter ces s investissements engagés sans cohérence, comme des gens qui n’ont pas la tête, et dont aucun n’est entièrement réalisés.
De quelque manière que j’examine le problème, je n’arrive pas à voir dans ce remaniement la moindre réponse à ces 3 terribles préoccupations.
L’avenir du Cameroun s’annonce sombre, très sombre.
Dieudonné ESSOMBA