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LE SDF A L’EPREUVE DE LA DEMOCRATIE ET DE LA LUTTE POUR LA DEMOCRATIE AU CAMEROUN – Icicemac

LE SDF A L’EPREUVE DE LA DEMOCRATIE ET DE LA LUTTE POUR LA DEMOCRATIE AU CAMEROUN

Grace a son audace du 26 mai 1990, le SDF a permis au Cameroun de prendre le train du multipartisme et de renouer avec les luttes pour la restauration de la liberté et de la démocratie. S’il réussit sa transition générationnelle actuelle (pour reprendre une expression à la mode), il donnera une nouvelle jeunesse au combat politique dans notre pays, perverti depuis toujours par des scories gangreneuses injectées par la colonisation pour freiner la naissance dans notre pays d’une conscience nationale.

La plus pernicieuse de ces scories, c’est la tribalisation du jeu politique. Partant du postulat institutionnalisé dès le début de la colonisation que pour mieux tenir les africains, il suffit de les diviser pour mieux les contrôler, en les cloisonnant dans leurs tribus respectives (et Dieu seul sait qu’elles étaient nombreuses), les acteurs politiques gouvernants se sont toujours évertués à ce que les Camerounais jugent les acteurs politiques sous le prisme de leurs origines ethniques.

Des ethnies qui ont été sciemment fossilisées dans des clichés choisis par les colons, de telle sorte qu’ils soient impénétrables et inconciliables. Ainsi, générations après générations, nous sommes en train de transmette sans nous en rendre compte ces clichés qui font que la nation camerounaise que nous proclamons officiellement, n’est en réalité qu’une simple fiction pour permettre un vivre ensemble forcé, tandis dans notre subconscient nous couvons et véhiculons une conscience de rejet ethnique qui bloque totalement la construction d’une véritable nation.

Um Nyobe a été le premier homme politique camerounais à comprendre cela et à mettre ne place une stratégie de lutte à travers l’UPC originelle. Malheureusement pour notre jeune nation, les colons ont compris le danger très tôt et ont noyé lui et sa révolution refondatrice de la vraie nation camerounaise dans le sang. J’ai fait cette longue introduction pour arriver à ce qui se passe actuellement dans le SDF.

Depuis que le Chairman Ni John Fru, le charismatique père du parti a annoncé il y a quelques semaines son intention de se mettre en retrait de la direction du parti, des ambitions éclosent comme des champignons a la première pluie. Ce qui n’est que normal dans une formation qui se considère comme le creuset du jeu politique démocratique dans notre pays. Pourtant le probleme du SDF comme celui du pays n’est pas celui d’hommes providentiels mais des stratégies ou des programmes politiques.

Au moment où le Chairman se retire qu’est ce qui faut faire pour remettre la parti sur les rails de la lutte pour la liberté et la démocratie au Cameroun qui a fondé sa naissance ? Pour répondre à cette question, il faut faire notre propre introspection et rechercher pourquoi après 30 ans de lutte, la puissante machine machine SDF qui a fait reculer la dictature en 1990 et 1992 n’a pas conduit le pays au bon port. Si nous répondons a ces questions, quel que soit celui que nous aurons choisi pour remplacer le Chairman, il va réussir. Mais si nous nous précipitons pour lui choisir un remplaçant sans avoir au préalable assaini la maison, nous courrons vers un échec certain. Sans avoir la prétention de connaitre notre parti plus que quiconque, je peux m’aventurer à identifier certains des pièges qui nous guettent sur le chemin de la précipitation dans la refondation que tous les militants et sympathisants appellent de leurs voeux. Le premier c’est nos propres statuts.

Les pères fondateurs qui les ont rédigés, étaient tous originaires des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, donc par conséquent profondément imprégnés du libéralisme teinte d’habeas corpus qui avait caractérisé la colonisation anglais et qui, préservé dans ces deux régions par la constitution fédérale de 1961, continuait à imprégner les esprits même après la progressive prise en main francophone avec Ahidjo et son remplaçant Biya, eux adeptes du totalitarisme politique sous couvert du jacobinisme français.

Ils ont ainsi rédigé des statuts pour dans leur esprit, faciliter la transition d’un régime autoritaire vers une démocratie libérale, se méprenant ainsi sur la nature du régime qui n’était pas simplement autoritaire, mais était dans son essence une dictature pure et dure. Ils ont ainsi conçu des statuts tellement « démocratiques » qu’ils ont hypothèqué toutes nos stratégies de lutte contre une dictature qui ne comprend que le langage de la force, en croyant naïvement la convertir en gentle men à la démocratie.

Pau bout de compte, ces statuts confondent la conquête du pouvoir tenu des mains de fer par une dictature avec la gestion d’une démocratie qui est encore à construire. D’où la naïveté de bruler les étapes en privilégiant dans le choix de ses dirigeants qui sont en réalité des « soldats » la voie des élections et des équilibres sociologiques afin de se conformer à tout prix à l’idéologie social-démocrate du parti. Or ce sont des recettes qui ne peuvent marcher que lorsque la démocratie est déjà rétablie.

Tout cela au détriment des seuls critères qui priment pour le choix des combattants, à savoir, la compétence, l’efficacité et le consensus, si on veut se conformer à la réalité machiavélienne qui veut qu’en lutte, la fin justifie les moyens. Nous avons continué dans cette myopie, aveuglés par notre autoglorification au point de nous refuser à nous interroger pourquoi notre parti est le seul dans ce pays et dans tous les pays où existent des dictatures à privilégier ce mode de dévolution de responsabilité.

En conclusion, nos statuts doivent être retouchés afin de les adapter au contexte de lutte, quitte à les remettre totalement en cause une fois la démocratie rétablie. Sinon nous continuerons à prêter le flanc a l’infiltration de nos rangs par le régime qui a plus de moyens que nous et a la pénétration des perversions comme l’achat des consciences, la corruption et les fraudes électorales pour vicier le choix de nos responsables. A l’instar des des cohortes de militants de circonstance que des candidats fortunés sont à mesure de mobilier sans scrupule, même dans des régions ou nous sommes faiblement implantés pour venir le jour des élections fausser les résultats.

Le deuxième champ c’est ce que je qualifie d’esprit de lutte. Dans l’effervescence actuelle pour le remplacement du Chairman, le sentiment qui prédomine dans nos foras internes et les réseaux sociaux est le même qui paralyse le parti depuis sa création à savoir la prédominance des approches ethniques comme je l’ai brossé dans l’introduction. Ces approches basées sur des clichés, sont globalement orientées vers une fracture arbitraire façonnée par le pouvoir colonial au moment des luttes pour l’indépendance pour les dénaturer.

D’un coté, des communautés « loyalistes » attachées à la hiérarchie quelle qu’elle soit et par extrapolation, dans une peur panique de la marginalisation et par réalisme politique, plus favorables à un modus vivendi avec le régime pour quelques prébendes, même si les choses ne vont pas dans le sens du changement démocratique qui fonde le parti. De l’autre, l’ambition démesurée des communautés « hégémoniques » à la soif de pouvoir insatiable, qui ne rêvent qu’à s’accaparer de tout dans l’intérêt de leurs communautés, et dans cette optique, prêchent pour une alliance avec d’autres partis communautaristes aux idéologies pourtant radicalement opposées.

Une vision vulgaire et primaire que la hiérarchie n’a pas réussi à étouffer jusqu’ici et qui en fin de compte a provoqué une hémorragie incommensurable dans les rangs du SDF en grossissant ceux de ses adversaires, et l’a finalement éloigné du leadership l’opposition ou son avènement héroïque et son radicalisme pour le changement démocratique du Cameroun l’avaient installé. Conséquences, la compagne d’aujourd’hui pour le remplacement du Chairman, au lieu de s’articuler autour des programmes, se réduit au choix entre deux camps inconciliables.

D’un côté, ceux qui veulent sauver les acquis à tout prix, en pactisant au besoin avec un régime qui, fermé au dialogue, étouffe dans le sang les revendications légitimes des populations anglophones, vivier naturel pour le parti. De l’autre, les apôtres du retour radicalisme d’antan et à la mutualisation de toutes les forces de changement dans une totale solidarité avec les populations anglophones martyrs du militarisme du régime alors qu’elles se battent pour le respect de leur identité dans le respect de l’esprit qui a présidé à la restauration de la nation en 1961.

Et comme par hasard aucun des camps ne nous dit comment il compte amener le parti a apporter le changement qu’il promet aux camerounais depuis 1990Le troisième écueil est celui des moyens. Ceux qui veulent prendre la direction du parti doivent dire aux militants ou ils prendront les moyens pour faire fonctionner un parti de changement. Car, sauf à réussir le pari difficile de revenir au parti de masse d’il y a quelques années qui se finançait grâce aux cotisations des militants et de sympathisants, les postulants a sa présidence doivent nous assurer sur les moyens avec lesquels ils comptent faire fonctionner le parti.

Car sur le plan légal, un parti ne peut espérer aux financements publics que s’il entre dans les institutions avec le grand risque s’il ne conquiert pas vite le pouvoir d’état, d’y être phagocyté épermanent, ou en interne d’être à la merci du chantage de ses élus qui, habitués aux avantages de la fonction et aux prébendes pour certains, vont le pousser vers toujours plus de collaboration avec le régime afin de maintenir leurs acquis, comme cela a été le cas du SDF depuis 1997.

Avec l’effet boomerang de perdre sa crédibilité et de se retrouver en fin de compte rejeté par les populations et éjecté du système par voie électorale comme l’est le SDF actuellement, au point de n’avoir à choisir qu’entre collaborer, renaitre ou disparaitre de l’échiquier. C’est certainement la peur de cet engrenage qui a poussé le MRC à prendre le risque de boycotter les derniers élections législatives, municipales et régionales afin de préserver son positionnement et sa virginité conquises après les élections présidentielles de 2018, gage de sa crédibilité aux du peuple du changement.

Les candidats au remplacement du Chairman sont dans l’obligation de rassurer les militants sur ce problème de moyens, sinon on comprendrait qu’ils veulent simplement s’emparer de l’appareil du parti pour le mettre au service de leurs intérêts personnels.Le quatrième défi est le drame que vit le peuple anglophone.

Le SDF a été créé par des anglophones. Il a conquis la présidence de la république en 1992 avec près de la moitié de ses voix apportées par les camerounais anglophones. Il est devenu le grand parti membre de l’Internationale Socialiste, internationalement respecté dans le monde, grâce à ses prouesses électorales en 1996 et 1997 qui, traduites en nombre de députés et de maires, démontraient le poids écrasant des anglophones dans l’éclat de sa nouvelle étoile et démontrait le caractère fondamental de sa dette envers le peuple anglophone qui lui avait carrément donne un chèque à blanc.

En contrepartie, ce peuple lui demandait une seule chose, l’aider à défendre sa spécificité de plus en plus étouffée par la majorité francophone déjà obese elle aussi. Et malgré quelques sirènes extrémistes, réclamait au départ une simple reconnaissance de sa specifitè historique, culturelle et linguistique reconnue par la constitution fédérale de 1961 et la possibilité de la garantir et de protéger dans le cadre d’un système fédéral.

Pour répondre des exigences aussi simples bien qu’existentielles, au lieu d’un dialogue inclusif, le régime Biya choisi la voie des armes et impose à plus du cinquième de la population qui a décidé de lui-même de venir nous retrouver pour reconstituer une nation fractionnée par 45 années de colonisation, une guerre atroces qui a ce jour a déjà fait près de 10 000 morts, la dette de reconnaissance du SDF vis-à-vis de ce peuple martyr est tellement lourd que l’histoire ne lui pardonnera jamais de l’abandonner sous le prétexte que le régime les confond tous a une bande d’extrémistes qui ont toujours été minoritaires et qu’on pourrait très facilement isoler en les invitant sur une table de négociation.

Quel est l’intérêt du SDF à moyen et à long terme en suivant le régime au pouvoir dans son jusqu’au-boutisme qui profite en grande partie qu’à ses barons civils et militaires confondus ? Sur la base de quelles preuves irréfutables, un responsable du SDF peut de manière péremptoire soutenir que ce sont seulement les sécessionnistes anglophones qui sont à l’origine de tous les crimes qui sont commis sous le couvert de la guerre avec les anglophones ?

L’histoire n’a-t-elle [as choisi le SDF comme le principal trait d’union entre les camerounais francophones et les camerounais anglophones ? S’ils abandonnent le peuple anglophone a son sort pour bénéficier de quelques prébendes du régime, comment le SDF convaincra-t-il les camerounais francophones de sa bonne foi, afin de les amener à les suivre massivement pour lui permettre de combler la perte des anglophones qu’ils a abandonnés dans les griffes de la dictature ?

Alors messieurs les candidats à la succession du Chairman dites aux militants et sympathisants ce que vous proposez pour mettre fin au calvaire du peuple anglophone à qui vous devez toute votre gloire.L’image que le SDF se donne actuellement de lui-même me rend pessimiste Car si le changement espéré arrive dans ces conditions, notre parti court vers un danger existentiel soit d’emboiter le pas à l’UNDP pour devenir l’appendice du parti au pouvoir, soit de se casser en plusieurs morceaux comme l’UPC avec l’appui du régime, abandonnant le terrain de la lutte à des partis plus constant et plus engagés pour la continuation de la lutte.

Par conséquent, ce n’est ni en incantant a tout vent des intentions révolutionnaires, ni en tentant de soulever dans les SDF les autres communautés ethniques contre les bamilekes sous prétexte que si l’un d’eux hérite de la tête du parti, il va l’inféoder au MRC, qui certainement jubile actuellement en nous voyant nous entredéchirer en son nom. C’est une publicité gratuite pour ce parti alors que nous avons beaucoup à faire pour redorer notre propre blason dans l’opinion.

Finalement, je pense intimement qu’au regard des préalables recensés ci-avant pour réussir la transition générationnelle, la solution se trouve entre les mains du Chairman. Je suis convaincu qu’il ne sera pas heureux dans sa retraite si après son départ le parti tombe entre les mains des aventuriers sans foi ni loi ou sombre dans le chaos.

Je fais appel à son grand cœur et son patriotisme que seuls les martyrs de l’indépendance et de la réunification égalent, pour réfléchir avec quelques sages (il en reste encore dans le parti) sur une solution de transition qui préserve la cohésion du parti et le retour aux idéaux originels par l’organisation d’un congrès de refondation afin de toiletter les statuts et des stratégies de lutte par la mise en place d’une équipe de combat consensuelle, ayant pour objectifs immédiats la remise du SDF au front de la lutte pour le changement, le retour de la paix dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest et enfin la restauration de la démocratie dans notre pays. En ce moment-là, le SDF pourra loisiblement revenir à ses options sociales-démocrates pour accélérer le développement du Cameroun et la promotion de la justice sociale.

E. FOPOUSSI FOTSO

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