Il n’y a pas de journée internationale de la paix au Cameroun

La Journée internationale de la paix des Nations unies devrait être un moment d’espoir et non de
désespoir. Malheureusement, alors que la « crise anglophone » au Cameroun entre dans sa huitième année, le gouvernement et les milices séparatistes persistent à croire que leur camp l’emportera par des moyens militaires, plutôt que par le dialogue, les négociations et le compromis.


En mai dernier, un ancien commandant séparatiste violent, Emmanuel Ndong, alias Capo Daniel, a renoncé à la quête d’indépendance et au recours aux armes. Il fallait du courage pour reconnaître que la force n’est pas efficace et qu’elle a causé des dommages considérables aux civils. Ndong a proposé un niveau d’autonomie pour les régions anglophones au sein de l’État unitaire du Cameroun.
Malheureusement, le gouvernement camerounais n’a pas su saisir l’opportunité offerte par le geste de Ndong. Certains Camerounais pensent que les clans qui se disputent la place autour du président Paul Biya, âgé de 91 ans, pensent qu’ils ont plus à gagner par la guerre qu’en s’attaquant à des décennies de marginalisation des anglophones ; la corruption excessive et le manque de transparence et de responsabilité dans l’économie de guerre pourraient être la force motrice de leur intransigeance.
Mettre fin à la violence – et obtenir la paix – n’est pas un objectif sentimental ou enfantin. Il ne peut y avoir de prospérité économique sans paix. Les recherches universitaires montrent que les guerres civiles freinent la croissance et qu’une population convaincue de la légitimité de ses dirigeants est beaucoup moins susceptible de se soulever contre eux. Peut-être, comme l’illustre cette vidéo de cinq minutes du Forum des fédérations, la délégation d’une partie du contrôle à un État centralisé névrosé peut-elle favoriser la paix et la stabilité.

Sept ans après le début de ce conflit armé insensé, il est impératif, et dans l’intérêt de l’élite politique camerounaise, de poursuivre le dialogue avec les leaders anglophones modérés. Un bon début serait de reconnaître le faux pas de 1972 qui a aboli le système fédéral qui reconnaissait la dignité des anglophones et des francophones au sein des deux États fédérés du Cameroun. Avec le revers de la médaille de 1972, les anglophones sont passés du statut de partenaires égaux avec les francophones dans la gestion de leurs territoires respectifs, à celui de subsumés et assimilés par le gouvernement central francophone. Cela reste l’une des principales causes du « problème anglophone » d’aujourd’hui.

Bien que les responsables du régime Biya aient affirmé aux diplomates que le soi-disant statut spécial mis en place après le grand dialogue national répondait aux préoccupations des anglophones, la réalité dans les zones de conflit est bien différente : la violence n’a fait qu’augmenter et de plus en plus de citoyens sont mécontents de l’incapacité de l’État à reprendre ses activités normales dans les régions anglophones.

Le gouvernement camerounais continue de rejeter les offres étrangères de médiation dans la crise, et les politiciens autour de Biya restent arrogants et dédaigneux tant que le Fonds monétaire international et la Banque mondiale continuent de renflouer le pays en dépit de sa mauvaise gouvernance, de sa corruption éhontée et de ses violations massives et bien documentées des droits de l’homme.


Dans le même temps, une grande partie du Cameroun est si peu sûre et si peu gouvernée que les administrateurs estiment qu’il est trop dangereux d’y vivre. Des cadavres sont jetés sur la route, les civils vivent dans la crainte des engins explosifs improvisés, les enlèvements contre rançon sont monnaie courante, les taxis et les motos sont incendiés, les élèves et les enseignants sont punis pour avoir fréquenté et les établissements de santé, qui manquent de ressources, sont attaqués. Les forces
gouvernementales et les milices, ainsi que des criminels opportunistes, exigent des extorsions de la part de la population. De nombreuses ambassades étrangères interdisent à leurs diplomates et aux citoyens en visite de s’aventurer dans les deux régions anglophones.

L’économie peine à survivre, les routes sont en mauvais état, l’électricité est intermittente, l’eau potable est rare et l’analphabétisme, les grossesses chez les adolescentes et la consommation de drogues sont en augmentation.
Une élite éclairée, soucieuse de sa propre survie, proposerait un nouveau règlement constitutionnel pour le Cameroun, donnant à tous les citoyens un intérêt dans un avenir prospère. Une feuille de route vers la paix impliquerait des discussions entre le gouvernement et les dirigeants anglophones, y compris les intellectuels modérés, les figures de l’opposition, les représentants militaires, les femmes, les jeunes, les chefs religieux et traditionnels qui ont vécu le conflit. Malheureusement, l’intérêt personnel et l’ignorance des deux parties empêchent toute perspective de paix et d’avenir meilleur pour le peuple camerounais.

Rebecca Tinsley, auteur de When the Stars Fall to Earth – A Novel of Africa (Quand les étoiles tombent sur terre – un roman de l’Afrique)

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