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Tassang Wilfried :” Comment vivre dans un pays où vous êtes considérés comme des étrangers ? “ – Icicemac

Tassang Wilfried :” Comment vivre dans un pays où vous êtes considérés comme des étrangers ? “

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Dans une lettre ouverte adressée aux ressortissants de la partie francophone du pays, le président du syndicat  enseignant qui est un des acteurs majeurs de la contestation qui a cours dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest reproche à  aux ressortissants de la partie francophone de s’être accommodés ou de tirer des dividendes du « régime kleptocratique et corrompu » qui dirige le Cameroun.

Sa lettre ouverte

Il m’était jamais venu en esprit qu’un jour , j’aurai besoin d’un visa, pour aller voir soit, mon frère Foukou à Dshang, ou mon oncle Mbida à Djoum , ou enfin mes camarades d’école , Sengue et Kegne à Mbalmayo.

Permettez-moi de commencer par un résumé succinct.

A l’invitation de Monsieur le gouverneur de la région du nord- ouest, Lélé l’Afrique Tchoffo, mes camarades et moi, chefs de syndicats, nous sommes rendus dans les services du gouverneur, le 04 octobre 2016. L’entourage du gouverneur était constitué par les responsables du commandement des forces armées et de la police, et ainsi que par les délégués régionaux de l’éducation. L’ordre du jour nous a t’ont communiqué, est les préparatifs pour la journée mondiale de l’enseignant qui devrait être célébrée le lendemain, le 05 octobre 2016. Le gouverneur s’indignait mots à peine couverts du fait que le chairman du Southern Cameroon National Council (SCNC ) ait été invité aux festivités du vingtième anniversaire du Cameroon Teachers’ Trade Union,(CATTU), notre syndicat d’enseignants, cérémonie qu’a présidée Monsieur le gouverneur. Je lui ai expliqué qu’il convenait de l’inviter, car, le programme prévoyait un service religieux pour la consolidation de l’unité nationale. Il ne semblait pas convaincu. Ceci m’a donné l’opportunité de discuter avec lui, une question qui semblait tabou ; le SCNC. Devant mes collègues tremblants, j’ai posé sur la table un projet de neutralisation de la SCNC. Pour se faire, j’ai expliqué à Monsieur le gouverneur, que ce mouvement et les syndicats anglophones avaient les mêmes revendications mais que seuls leurs méthodes et buts différaient. Pour se faire donc, il fallait tout simplement que les administrateurs sur le terrain et l’élite politique du RDPC puisse porter au président Paul Biya, les revendications des autochtones du nord-ouest et du sud-ouest, communément appelés anglophones. Et je continuais en disant que si Paul Biya résolvait les problèmes présentés par les anglophones, cela lui donnerait une légitimité et un fond de commerce politique à nul pareil. Et logiquement le SCNC n’aurait plus sa raison d’exister.

Malheureusement, le gouverneur avec son entourage ont plutôt trouvé comique mon exposé. Du haut de leur citadelle, ils pensaient tout maitriser, et que l’autorité de l’Etat passait avant tout, même s’il eût fallu qu’une partie du peuple soit traitée en esclave. Je leur ai dit que nous n’étions pas loin d’une grève générale si les problèmes du sous système éducatif anglophone n’étaient pas résolus. Rien n’y a fait.

J’aimerai encore y verser quelques détails pour étayer nos efforts pour parvenir à résoudre l’implosion qui s’annonçait à l’horizon.

Le 23 décembre 2015, grâce au gouverneur, nous avons pu rencontrer vers 23 heures, le Professeur Jacques Fame Ndongo, MINESUP, Chancelier des Ordres Académiques et sa suite à l’hôtel AYABA. Ils étaient dans le nord-ouest pour installer dans ses fonctions, Madame la Vice Chancellor (recteur) de l’université de Bamenda.

En présence du gouverneur, nous avons évoqué la marginalisation, puis l’assimilation qui est passé au degré supérieur qu’est l’annihilation du sous système éducatif anglophone. Monsieur le ministre avait une réponse toute faite depuis Yaoundé. Il déclara que le Cameroun est un pays bilingue et que chaque enseignant était libre d’user de la langue qu’il voulait et ce sur tout l’étendue du triangle national. Du haut de ses fonctions régaliennes, il demanda si les syndicats d’enseignants anglophones voulaient changer la constitution du Cameroun. Il ne montra aucun remord de savoir que les enseignants francophones titulaires du Baccalauréat de l’enseignement secondaire et de Licence étaient en formation pour après, enseigner les enfants anglophones dans une langue que les pauvres diables ne comprenait même pas. Il était choqué de nous entendre mettre en doute, la qualité des diplômes octroyés à ces assassins académiques.

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Nous ne pouvions cacher et notre colère, et notre amertume. C’est à la sortie de cette audience que nous avons décidé de lancer une grève. Le but était de bloquer le stage pratiques des élèves professeurs d’expression française, de l’école normale supérieure ( ENS) de Bambili, de l’ école normale supérieure d’enseignement technique ( ?) ENSET de Bambili et de Kumba. Ceux du deuxième cycle s’apprêtaient à aller commettre un génocide éducatif de deux mois après que ceux du premier cycle l’ait commis pour trois mois durant tout le premier trimestre. L’annihilation du sous système éducatif anglophone était tout à fait programmée. Pour la petite histoire, l’écrasante majorité de ces élèves professeurs est constituée de francophones et leur langue d’enseignement est soit le français ou soit un baragouin indescriptible, compris seulement des Marciens.

Le 31 décembre 2015, le gouverneur de la province du nord-ouest convoque d’urgence une réunion de crise. Etaient présents, l’entourage habituel du gouverneur, les chefs des syndicats, quelques anciens collaborateurs de l’éducation nationale, les parents d’élèves et la société civile. Apres huit heures de débats stériles, la réunion a été renvoyée pour le 2 janvier 2016.

La réunion du 2 janvier accouche également d’une souris, car malgré la présence cette fois ci de la Vice Chancellor et les directeurs de l’ENS et de l’ ENSET de Bambili, tous se sont déclarés incompétents à réorienter les élèves professeurs d’expression française pour leur stage académique. La température retombe quelque peu quand j’informe les participants que ce même jour, nous (chefs de syndicats) avons été invités par le MINSUP pour le rencontrer à Yaoundé le 4 janvier.

Sur insistance des syndicats, la réunion du 4 janvier 2016 sera co-présidée par le MINESEC, et le MINESUP. Apres quatre heures de débats animés et parfois houleux, le MINESUP leva la séance. Les syndicats rentraient, pensaient- ils, avec quelques « acquis » à court et à long terme, à savoir :

L’arrêt immédiat des stages académiques des élèves professeurs francophones dans le sous système anglophone

Le redéploiement des professeurs francophones, en poste déjà dans les lycées et collèges du sous système anglophone.

Le dernier des ministres, j’allai dire le premier ministre, Mr. Philémon Yang, devrait quant à lui prendre les décisions à long terme.

En vain, nous avons attendu la note ministérielle mettant en exécution les résolutions de la réunion du 4 janvier. La commission tripartite que devait être créé le Premier Ministre sur instruction et non sur proposition du MINESUP était devenue une chimère. Notre insistance n’y a rien fait.

Les affectations d’août et septembre 2016, au lieu de respecter l’esprit des résolutions de la réunion du 4 janvier, sont plutôt venues enfoncer le sous système anglophone en enfer. Non seulement les enseignants francophones déjà en place sont maintenus, ces affectations charriaient encore plus d’enseignants d’expression française en quantité impressionnante dans le sous système anglophone. Comme pour nous dire que « vous allez faire quoi ?». C’était la goutte d’eau qui fût déborder le vase.

Immédiatement les syndicats d’enseignants anglophones du secondaire et de l’université de Buea ont lancé le mot de grève illimité. Fidèles à leurs habitudes, Yaoundé a pris notre détermination à la légère. Quelle a été leur réaction ? Quelques semblants réunions par ci, quelques enveloppes glissées ci et là a quelques acteurs du sous système anglophone. Rien n’y est fait, nous sommes restés soudés comme un seul homme.

Le 5 octobre 2016, sous le regard amusé du gouverneur du nord-ouest, nous avons lancé le mot de grève illimitée dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest , aujourd’hui devenu Southern Cameroons.

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Jusqu’au 21 novembre Yaounde qui croit maitriser la situation n’en a cure. C’est alors qu’un deuxième groupe d’acteurs entre en jeu. Dans les rues de Buea, au cours d’une marche pacifique, nos respectables hommes de loi, en l’occurrence les avocats du Common Law sont humiliés, bastonnés, trainés dans la boue…. L’humiliation du peuple du Southern Cameroons est à son comble !

Dois-je passer sous silence, les événements de l’université de Buea, où les pauvres étudiants à mains nues, parfois assis à même le sol ont été matraqués, humiliés, violées, torturés, traînées dans les eaux d’égouts par les forces du désordre de la république du Cameroun ?

Voulez vous que je passe aussi sous silence le massacre de Bamenda, des populations manifestant pacifiquement à mains nues le 08 décembre 2016? La soldatesque sanguinaire de la république du Cameroun a tiré à balles réelles sur la population civile avec à la cle , plusieurs morts ! Et ce en direct de plusieurs chaines de télévision nationales. Et pendant ce temps que faisait le président de la république du Cameroun, Paul Biya ? Il s’amusait à se prendre en photo avec les titis, je veux dire les lionnes ! Incroyable !

Voulez vous que je ferme les yeux sur les arrestations arbitraires en cours ou les conditions d’incarcération de nos compatriotes du Southern Cameroons? Certains sont enfermés pendant de longs mois, dans les bunkers souterrains sans aucun rayon de lumière. Autant dire que même les condamnées à mort sont mieux traités qu’eux…

Oui nous avons compris que le sang qui coule dans nos veines, n’a aucune valeur à vos yeux et que le chimpanzé ne peut jamais être le frère du gorille !

Pour l’histoire de ce pays, je vois renvoie auprès de Mr. Abouèm à Tchoye à Bafia. Ou, entrez son nom dans le moteur de recherche Google et vous serez édifiés. C’est le camerounais francophone le plus honnête.

J’aimerai vous poser quelques questions. Si vous étiez à notre place :

Croiseriez vous les mains et voir vos enfants devenir esclaves dans « leur pays » ? Il est vrai que nous sommes tolérants, mais nous n’accepterons jamais l’injustice érigée en système nous broyer. Nous avons été sincères avec vous au point d’élire un descendant direct de la Menoua, premier ministre du Southern Cameroons, j’ai cité John Ngu Foncha. L’un des secrétaires généraux des services du premier ministre était un originaire de Douala… Et puis et en plus, vous souvenez vous, nous avons accueillit vos frères et sœurs, (ceux-là même qui s’insurgent contre nous aujourd’hui) lorsqu’ils étaient pourchassés par Ahidjo et les français parce qu’ils voulaient l’indépendance de leur pays.

En retour qu’avons-nous reçu ?

La destruction de notre parc de génie civile- PWD

La destruction de nos banques- Cameroon Bank était l’une des plus grande banque de l’Afrique de l’ouest dans les années 60. Demandez aux hommes d’affaires Bamilékés.

La destruction de notre société nationale d’électricité- POWERCAM

La destruction de notre loterie nationale.

La destruction de notre réseau routier, il y a jusqu’à quelques semaines seulement, pour se rendre de Buea à Bamenda, il fallait passer par la région du littorale et celle de l’ouest…

Le démantèlement de nos infrastructures portuaires

La destruction de nos aéroports et du Cameroon Air Transport, opéré par la CDC…

La destruction du Marketing Board, WADA, Santa coffee, Ekona research …

La ruine programmée de nos hommes d’affaire- Nangah Company a par exemple construit la maison du parti de Bafoussam à moindre coût par rapport aux entreprises françaises.

Le pillage de nos ressources naturelles. Presque tout le monde est francophone à la SONARA pourtant située à Limbe. Où la SONARA paye-t-elle ses impôts ? surement pas à Limbe, mais à Douala, mais à Yaoundé …

Bref, vous avez détruit tout notre tissu économique pour nous émasculer. Tel un serpent bois qui a broyé sa proie, l’heure est venue pour que nous soyons avalés. C’est pourquoi vous voulez nous prendre la dernière chose qui nous reste ; notre système éducatif. NON, NOUS RESISTERONS JUSQU’AU DERNIER, ET LE DERNIER RESSISTERA JUSQU’A SA DERNIERE GOUTTE DE SANG !!! 57 ans de servitude c’est trop ! ENOUGH IS ENOUGH !!!

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Comment vivre dans une société où un juge de la Cour Suprême du Cameroun est traité de terroriste, arrêté et emprisonné au mépris de la loi ?

Comment vivre dans une société dans laquelle , l’injustice a été érigée en vertu ?

Comment vivre dans une société où les droits élémentaires, comme la liberté de protester est un crime sanctionné par la peine de mort ?

Comment vivre dans un pays où la constitution est ballotée au gré de la politique politicienne ? rappelez-vous, la constitution de 1961 qui consacrait la réunification entre la république du Cameroun devenue Cameroun Oriental, et le Southern Cameroons devenu le Cameroun Occidental, stipulait bien que le caractère fédéral des deux Cameroun sera immuable. ET QU’EN AUCUN CAS, LA STRUCTURE FEDERALE NE DEVRAIT ETRE CHANGEE ! ET QUE LES DEUX ETATS QUI COMPOSENT CETTE FEDERATION AVAIENT LE MEME STATUS. Cette constitution allait même plus loin en disant qu’aucun des états fédérés ne devrait user de sa puissance ou de tout autre chose pour assujettir l’autre ! Où en sommes-nous aujourd’hui ? La constitution de 1961 a été bafouée par la fraude organisée le 20 mai 1972, à cause de l’or noir découvert dans le Cameroun Occidental. Et le coup de grâce a été donné par Paul Biya en 1984, quand il est revenu au nom d’origine du Cameroun francophone : la REPUBLIQUE DU CAMEROUN , consacrant de facto, la phagocytose du Southern Cameroons !

Comment vivre dans un pays où même ce qu’ils ont voulu bien mettre dans leur constitution n’est pas respecté. Depuis 21 ans on parle de décentralisation , pourquoi n’est elle pas effective 21 après ? On parle de déclaration des biens, est-ce que le président Paul Biya a déclaré ses biens jusqu’à ce jour ?

Comment vivre dans un pays où vous êtes considérés comme des étrangers ? On vous affuble de tous les noms : « biafrais », « ennemi dans la maison »… je peux encore citer des tonnes et des tonnes de faits…

Le peuple naïf anglophone pensait à tort que leurs « frères » francophones se joindraient à eux pour lutter contre la tyrannie, que non. Le francophone s’est soit accommodé ou tire des dividendes de ce régime kleptocratique et corrompu.

Comment comprendre que le sort de votre drapeau à nous imposé , avec une étoile, vous préoccupe plus que le sort de huit millions des autochtones du Southern Cameroons ? Vous êtes allés jusqu’à organiser une contre manifestation au pays de l’oncle Sam !

A force de tirer un câble, il finit par rompre ! Oui, le moment de rupture est arrivé. Ce qui se passe dans le Southern Cameroons, c’est la révolte de l’esclave !

Si vous vous accommodez de ce régime, nous pas. Vous pouvez demeurer avec votre pharaon. Quant à nous, nous avons déjà traversé la mer rouge. Gare au régime occulte de Yaoundé avec ses BIRs, vous serez engloutis dans la mer rouge.

Je remercie une certaine classe intellectuelle francophone qui a bien voulu parler en faveur des anglophones, même si votre plaidoyer en faveur des anglophones est tombé dans les oreilles des sourds d’Etoudi. Mes pauvres frères qui pensent encore que le fédéralisme est possible alors que Yaoundé est incapable de mettre en marche la décentralisation. Aux yeux du dinosaure d’Etoudi, qu’est-ce qui est pire ?

Mes frères francophones, ai-je donc le droit de vous tenir pour responsable de la situation comateuse dans lequel le Cameroun est plongé ? Quand vous finirez par prendre votre courage à deux mains, je serai à vos cotés.

 

Tassang Wilfred, SCACUF Secretary General

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