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Peut-on changer le Cameroun? L’UdM et la fin de l’utopie – Icicemac

Peut-on changer le Cameroun? L’UdM et la fin de l’utopie

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Depuis les secousses que traverse l’Université des Montagnes (UdM), j’ai hésité à m’exprimer en me disant « A quoi bon? ». Parmi les acteurs de ce projet, en plus d’Ambroise Kom, je connais aussi très bien André Ntonfo (qui y exerce toujours) qui a dirigé ma thèse de 3ème cycle. Si les deux m’estimaient autrefois trop « jeune » pour m’impliquer dans leurs réunions stratégiques du C3 (voir ci-dessus), ils m’en parlaient et j’étais parmi les premiers lecteurs de leurs publications.

Plus tard, comme de nombreux expatriés camerounais que sollicitait Ambroise Kom, j’ai été bien impliqué dans ce projet. Parti en 1997 pour le Canada où je termine une deuxième thèse en 2000, j’obtiens la même année mon premier poste à l’Université de Calgary. L’UdM prend alors forme et j’obtiens des dizaines de livres de la bibliothèque de mon université. J’en parle à Kom qui me demande de les envoyer (à mes frais) à Washington où Godefroy Foteu avait apprêté un container pour Bangangté. Cela me coûte à l’époque quelques centaines de dollars… Je ne parlerai pas ici de toutes autres sortes de contributions qu’on faisait simplement sur un coup de fil ou un email d’Ambroise Kom. Je me souviens des nuits longues passées à finaliser et trouver les mots justes pour un projet de financement qui a réveillé toutes les convoitises. Mais il y a mieux.

En 2013, j’ai assisté à Bangangté à un Conseil d’orientation de cette institution. Après la séance, j’avais senti que le « rêve » intellectuel risquait de se transformer en cauchemar : un membre (« homme d’affaires », encore en place) voulait utiliser l’UdM comme caution intellectuelle pour une entreprise d’élevage qu’il souhaitait lancer en partenariat avec des Espagnols (disait-il). Les débats furent houleux, et connaissant la genèse du projet UdM, je me suis demandé comment on pouvait oser pareille requête. Il ne fallut pas longtemps pour comprendre que l’institution était en train d’être prise d’assaut par des vampires. Le vers était déjà dans le fruit. Depuis quand?
Fort de ma connaissance du projet original (et originel), lorsque j’ai été approché pour apporter une réflexion sur l’UdM (et, partant, sur notre pays) à travers Germinal, je me suis dit que c’était peut-être l’opportunité d’envisager les conditions de possibilité d’une véritable société civile au Cameroun. Je le fais en m’appropriant le titre de la première publication du C3, Changer le Cameroun. Pourquoi pas? (1990) Mais est-il vraiment possible de changer notre pays?

Étudiant à l’Université de Yaoundé dans les années 1990, alors que la plupart de ses collègues restaient englués dans des programmes obsolètes sans grande envergure théorique, Ambroise Kom nous a familiarisé avec un certain nombre de penseurs Herbert Marcuse. Dans son livre La Fin de l’utopie (Paris, Seuil, 1968) Marcuse dit en substance qu’en contexte marxiste de lutte de classes sociales, l’utopie prend fin par sa concrétisation, à savoir la victoire des classes dominées. En tant qu’opérateur historique portant sur des transformations sociales tenues pour impossibles par les vampires du statut quo, ces métamorphoses imposent une césure décisive entre l’idéal utopique de la société totalement libre (c’est-à-dire, utopique dans l’incurie postcoloniale) et le conformisme ou l’asservissement complaisant.

Tellhco

Cette idée est confirmée par Marcuse qui dit « Et justement parce que les possibilités prétendument utopiques ne sont pas du tout utopiques, mais constituent la négation historico-sociale déterminée de l’ordre en place, la prise de conscience de ces possibilités, la prise de conscience aussi des forces qui l’empêchent et qui la nient, exigent de nous une opposition très réaliste, très pragmatique. Une opposition libre de toute illusion, mais libre aussi de tout défaitisme, car le défaitisme, par sa seule existence, est une trahison des possibilités de la liberté en présence de l’ordre régnant » (pp. 15-16).

 

Ce détour par Marcuse pour engager une réflexion sur l’Université des Montagnes (UdM), dans une formulation qui, à première vue, est une assertion me semble importante pour toute tentative de mesure du nouveau monde de l’UdM, ou de l’espace mental de quelques entrepreneurs ayant pris d’assaut un projet qui était destiné à « changer le Cameroun ». Changer le Cameroun ?

Oui, en effet. La création de l’UdM avait pour objectif de changer le Cameroun à partir d’un espace géographique, celui de Bangangté que le hasard administratif situe à l’Ouest Cameroun. Ce qui semblait alors la générosité des autorités traditionnelles locales a permis d’implanter une institution sans nulle autre pareille en Afrique. Ce dont il faut se souvenir, et que quelques hurluberlus s’attachent à enterrer, c’est que l’UdM est née du projet « Changer le Cameroun », un collectif apolitique qu’avait mis sur pied Ambroise Kom pour offrir aux décideurs des outils et, surtout, des propositions pouvant permettre de faire décoller le pays dans tous les secteurs. C’est dans ce cadre qu’est publié un livre blanc Changer le Cameroun. Pourquoi pas ? (1990).

C’est dans ce think thank qu’est née l’idée d’une université, laquelle deviendra l’UdM. Dans des pays sérieux, ce genre de travail est payé très cher par les décideurs politiques qui en font même une Bible. Ambroise Kom l’explique abondamment dans son dernier livre, Université des Montagnes. Pour solde de tout compte (2017). Au vu de ce qui se passe au sein de cette institution, peut-on donc vraiment sauver le Cameroun ? Qu’en est-il de l’utopie originelle ?

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Il serait fastidieux de revenir sur toutes les péripéties d’une institution dans laquelle des gens se sont naïvement investis sans compter. Pendant ce temps, une équipe de charognards et de rongeurs travaillaient avec acharnement plutôt à investir dans cet établissement à travers sociétés écrans et marchés divers. À l’investir de toutes les tares de l’administration camerounaise, à l’investir de tous les cousins, maîtresses, « frères du village », enfants, frères et amis. Cela était-il évitable ?

J’en doute. Et Ambroise Kom, qui a pourtant lu Marcuse, aura le temps de méditer sur ses erreurs et sa naïveté face à l’escobarderie qui l’entoure depuis l’aventure de l’UdM. La première, c’est d’avoir cru à l’utopie en terre camerounaise. Après les multiples retournements de veste et assassinats calculés qui ponctuent l’histoire de ce pays, comment peut-on croire que, dans un contexte où personne ne croit au bénévolat, mais au profit et aux dividendes, des compatriotes pourraient envisager un modèle de fonctionnement universitaire américain que personne, strictement personne ne connaît et ne souhaite commencer à appréhender ?

En première ligne, un certain Lazare Kaptuè, professeur de médecine. Propriétaire, entre autres, de clinique privée, d’une équipe de football, maire de village où triomphe sa gloire à la tête de « son » université. Mais, aussi, plaignant dans de nombreuses causes devant des tribunaux, probablement aux frais de l’UdM l’« œuvre de sa vie » dont il ne sait pourtant pas comment elle est née : « je n’étais pas [affirme-t-il] membre du C3. […] je ne sais pas de quoi il s’agit ! Autrement dit, et à ma connaissance, ce n’est pas le C3 qui est promoteur de l’UdM » (Ouest-Littoral n° 406 du 12 janvier 2016). Aveu cruellement sincère ! Sa vie a peut-être commencé il y a une dizaine d’années…En cooptant ce professeur qu’on croyait respectable, les Ntonfo, Kom, Futcha (les deux derniers sont exclus de l’UdM pour avoir contesté une gestion frauduleuse) espéraient faciliter la tâche à une institution qu’ils voulaient phare. Ils doivent bien s’en mordre les doigts.

Je relevais plus haut l’hypothèse de l’impossible utopie dans des milieux où l’appropriation violente est la seule règle. Un ami universitaire français, parmi les dizaines s’étant impliqués dans ce projet suite aux sollicitations d’Ambroise Kom, me signalait, pince sans rire, en caricaturant : « Les Bamis ont failli me tromper. Voilà une parfaite illustration de votre ‘dynamisme’ de prédateurs ». Pour preuve, il me faisait remarquer « chaque fois que des Bamis (ou des Camerounais) se mettent ensemble, cela se termine devant les tribunaux, au cimetière ou dans la rue pour les plus chanceux.»

La caricature vaut ce qu’elle vaut, illustre l’incapacité à « faire foule » (Césaire), mais surtout l’instinct de prédation et d’appropriation ancré dans l’esprit de beaucoup.

L’allusion au cimetière n’est pas une banale galéjade. Lorsque Benjamin Zebaze a eu le courage d’étaler dans Ouest Littoral les manœuvres mises sur place à l’UdM par une équipe rongée par la fraude, un certain Shanda Tonmé, n’y est pas allé de main morte. Après avoir littéralement disqualifié la prise de parole de Zebaze du fait qu’il ne serait qu’une sorte de « demi-Bamiléké » (Sa mère n’est pas Bamiléké. Vive le microtribalisme national !), le sieur Shanda (c’est ainsi qu’on l’appelle dans le milieu) a eu pour Zebaze un message sans nuance le 11 décembre 2015. Celui-ci a été largement diffusé par Jean-Vincent Tchienehom, un «grand » journaliste œuvrant dans l’ombre à Bangangté: pour ceux qui, comme Zebaze, osent s’attaquer à la vache à lait, « le salut est dorénavant la chambre froide de la morgue la plus proche» (email du 11 décembre 2015, transmis aux listes Baminet et Concertation Baham par Jean-Vincent Tchienehom le même jour. Zebaze lui répond à cette occasion).

Sindjoun Pokam qui, comme Shanda, signe et se fait appeler « professeur » sans en avoir les qualifications ni mis les pieds dans un amphithéâtre, explique en termes clairs la purge qu’ils ont coordonnée à l’UdM : « Par la suite, nous avons liquidé certains d’entre eux » (Le Jour n° 2398) Si les mots ont un sens, il est impératif de s’interroger sur la gestapo et la terreur déployées par des individus qui, pendant des années, ont aboyé sur la place publique sous le prétexte de combattre le régime Biya qu’ils accusaient de tous les maux. Après avoir pris en otage le Laakam qu’ils ont vidé de toute substance, ces deux messieurs sont passés de la défense fantomatique des Bamiléké (un rapport d’activités à cet effet serait utile) à la « liquidation » promise desdits Bamilékés dont ils s’improvisent insolemment « porte-parole ». Voilà les faits d’arme des nouveaux maîtres de l’UdM dont Ambroise Kom est devenu, au fil des ans, le seul et véritable surmoi. Qui dit mieux ? C’est bien pire que l’appropriation en marche de l’institution dont un autre exemple suit.

Il y a quelques semaines, un ami me fait suivre un message d’un monsieur invitant à une réunion du C3, le groupe initiateur du Collectif Changer le Cameroun dont M. Kaptuè ignore l’existence et d’où naît la création de l’UdM. En bonne place, pouvait-on lire, il devait être aussi question de coopter de nouveaux membres de ce groupe qui a produit des travaux exceptionnels sur le pays. L’ami me demande si joindre ledit groupe m’intéresse. J’étais choqué par deux choses.

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D’abord, le fait de lancer un SOS pour participer à un ensemble qui n’avait jamais fonctionné comme association mais comme simple groupe d’étude ponctuel. Ensuite, le fondateur dudit C3, Ambroise Kom, y était aussi banalement invité…comme toute autre personne.

Enfin, non seulement la liste était truffée d’individus qui avaient fui ladite structure par peur de représailles (et qui sont revenues dès qu’ils ont flairé les millions, que dis-je les milliards à l’UdM), mais elle comportait aussi les noms de sbires qui n’y avaient jamais mis les pieds et dont les capacités de conceptualisation ou de stratégies sont au talon. Du moins dès qu’il n’est pas question d’amasser de l’argent. Voilà comment l’utopie est mise à l’épreuve de « la politique de prébendes » (Richard Joseph). Le Cameroun, c’est le Cameroun : vous donnez naissance à un enfant et l’élevez. Devenu adulte, autonome et perçu comme productif, un fantôme surgit avec un acte de naissance pour annoncer que ledit enfant n’est pas le vôtre.

Pour sécuriser lesdites prébendes, aux dépens des enseignements, le cartel de Bangangté ne recule devant rien. Au fait, depuis qu’on a chassé Hervé Mogto, que devient la kinésithérapie qu’il avait créée et qu’il portait à bout de bras ? Après avoir organisé une purge systématique par l’expulsion d’Ambroise Kom, Armelle Cressent, Hervé Mogto, Henri Djoko et Innocent Futcha, M. Kaptuè et compagnie engagent une série d’initiatives dont les étudiants et le public ne savent pas qui en règle les factures. En bonne place, ils mobilisent à grands frais la presse dont une large partie est reconnue au Cameroun pour sa mendicité (lire à cet effet Autoritarisme, presse et violence au Cameroun, Paris, Karthala, 2014). Quelques papiers sans envergure sont écrits dans des journaux de la place ou sur des supports électroniques, parfois avec des pseudonymes. Un voyage est organisé en catastrophe à Bangangté après la publication de l’ouvrage d’Ambroise Kom. Mais, aussi, avec l’aide de son fils, Mme Jeanne Ngogang se fait inviter sur Vox Africa (merci aux présentateurs de le révéler). Elle y effectue une performance tellement lamentable que la vidéo est retirée du web.
En plus de la « liquidation » des indociles, les dieux de l’UdM s’emploient à démobiliser. Sachant tous les efforts déployés par Kom pour impliquer la diaspora dans l’utopie pendant ces vingt dernières années, Kaptuè et Cie ont tenté d’inventer une « diaspora alternative » qui vient créer des centres de formation professionnelle dans une Université. Ainsi, apprend-on, « […] nous recrutons ceux qui ont un minimum un niveau BEPC ; et la formation va durer sur une année et alterner entre la théorie et la pratique » (La Nouvelle Expression n° 4461 du 19 avril 2017, p. 2). Sommes-nous bien dans une université ou dans un collège d’enseignement technique ? Les tyranneaux prébendiers ont choisi la « diaspora »qui ne pose pas de questions et qui tire la jeunesse vers le bas. Cette diaspora, « diaspourrie », c’est aussi celle qui pense à ses vieux jours, qui prépare sa retraite camerounaise. Qui, malgré une certaine réussite en occident, s’acharne à sécuriser une reconnaissance villageoise ou nationale. Ils sont professionnels en Europe, ingénieurs ou fonctionnaires en Amerique du nord. Après avoir pris le soin d’écarter les véritables promoteurs engagés dès la première heure et ayant travaillé d’arrache-pied, Bangangté procède comme ils le font en politique : on recrute autour des pionniers, organise les reniements et les nouveaux associés, devenus des faire-valoir, s’extasient. Ils sont invités à Bangangté où ils viennent triompher à grands frais, avec des programmes de visite dignes de chefs d’État. En attendant d’être « liquidée » et envoyée à la morgue avec Benjamin Zebaze, l’autre diaspora qui a le tort d’interroger et de requérir des éclaircissements au sujet de la gabegie à l’UdM attend toujours une suite à ses requêtes transmises en 2015 au clan Kaptuè.

Elle a au contraire reçu de la « diaspora de Bangangté » une « mise au poing », avec allusion voilée à des représailles judiciaires. Heureusement, nous sommes dans un pays où les avocats ne recommandent pas d’acheter les juges (Les invitations à la barre restent attendues). Ces « agents-double », qui s’accommodent joyeusement des détournements de dons vers des entreprises privées ou leurs villages, encouragent à l’UdM des pratiques « tropicales » qu’ils ne risqueraient, à aucun moment, oser dans leur pays de résidence. Peut-on changer le Cameroun ? Est-ce donc La fin de l’utopie ?

Depuis que la crise est devenue ouverte à l’UdM, en plus de « liquider » les personnes qui posaient un peu trop de questions, les « coupeurs de têtes » de Bangangté n’ont pas seulement marché sur leurs propres textes règlementaires. Sur recommandation d’avocats qu’on imagine d’autant plus grassement payés que le mensonge doit triompher sur toute vérité, ils n’ont pas seulement acheté une poignée de magistrats véreux (lire, Ambroise Kom, p. 150) et quelques mauvais publireportages déguisés.

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Pas seulement mis en péril une institution qui avait tout pour réussir. Pas seulement continué à se distribuer diverses prébendes. Leur « chance » inouïe est d’avoir bénéficié du silence complice de ce qu’on pourrait appeler, faute de mieux, la « société civile ».

Parlant de cette « société civile » qui, au Cameroun, est souvent le marchepied le plus efficace pour toute carrière politique, la négociation des royalties et l’obtention des marchés, il y a dans la faune locale un personnage qui s’en réclame : M. Shanda Tonmé, à la tête d’une « commission indépendante » qui lutterait « contre » la corruption et la discrimination. Il ne manque jamais l’occasion d’aboyer et de pondre des correspondances agitées aux autorités publiques chaque fois qu’une « injustice » sélective est mise sur la place publique. Revenu précipitamment il y a quelques années à l’UdM et à l’AED pour des raisons qu’il est seul à maîtriser, ses « faits d’arme » sont essentiellement ses viles attaques contre Ambroise Kom et Benjamin Zebaze destiné à la morgue. Shanda, que beaucoup dans l’UdM qu’il dit désormais « défendre », a-t-il lu une seule ligne du Rapport Kago/Tchatchoua/Yomi qui met à nu toutes les resquilles dans cette institution ? Voit-il seulement ce dont tout le monde parle, à savoir que l’UdM, qui n’avait jamais été conçu comme un « projet Bamiléké », est en train de devenir un « projet Bangangté » ? La « discrimination », ou la « corruption », version Shanda, si elles sont avérées, ne tiendraient que quand on croit percevoir et on agite un « complot anti-Bamiléké » ? Ses communiqués à ces sujets, tel qu’il sait en grimacer, restent attendus…

Mais les nouveaux seigneurs (et saigneurs) de l’UdM n’ont qu’à bien se tenir : nul n’est à l’abri de l’exode. Ils risqueront d’être priés de rentrer « chez eux » et s’en rendront alors compte : le Ndé s’installe !!! C’est du moins la lecture d’un membre encore en place qui s’interroge sur deux choses. D’abord, la soudaine générosité de certaines « élites » du Ndé qui étaient restées longtemps indifférentes au projet lorsqu’elles ne l’ont pas combattu. Ensuite, la nouvelle distribution des postes de responsabilité qui, selon de nombreux avis, a été « ndéisée » sur mesure. Où sont ceux qui jacassent au quotidien sur la marginalisation des Bamilékés dans la nation camerounaise ? Que l’UdM des Kaptuè nous montre donc la différence… Si au moins la mission éducative et sociale de l’institution était accomplie sans maquillages ni fraudes systémiques !

Bien avant que la crise actuelle ne s’étale sur la place publique et que les « liquidations » aient été exécutées, Ambroise Kom avait écrit à un groupe de dix personnalités pour les alerter du danger auquel faisait face l’UdM. Il avait d’ailleurs informé Kaptuè et ses partenaires d’affaires de l’UdM de sa démarche. Ce que Kom ne sait pas (ou refuse de savoir), c’est qu’en dehors de Fabien Eboussi Boulaga et de Fernando Lambert (professeur émérite canadien), les destinataires de son alerte étaient tous en grande partie des hommes d’affaires, et des hommes politiques (en activité ou en devenir). Autrement dit, ces acteurs ont exactement le même profil que les clephtes à l’œuvre à Bangangté.

En réaction à l’appel de Kom, silence calculateur pour certains, timides initiatives sans suite pour d’autres. Au total, les gens approchés par Kom n’ont aucun intérêt à s’attaquer à leurs « frères » du village, à de potentiels alliés politiques dont ils pourraient bien avoir besoin demain. Autant ne plus se voiler les yeux : l’échec de l’UdM, ce serait aussi la conséquence de stratégies successorales secrètes et de calculs politico-financiers. Comme le signalait quelqu’un, à voir tous les maquignonnages cultivés à Bangangté (et ailleurs dans le pays), on risquera un jour de demander sincèrement des excuses à Paul Biya. Hypothèse terrible dans ses prérogatives !

Au-delà de tout ce qui précède, en tant qu’enseignant et chercheur, je ne peux que m’interroger sur ce que devient la formation à l’UdM puisque la valeur d’une institution universitaire est d’abord la qualité de ses produits. Le recrutement annoncé de diplômés du secondaire, le démantèlement de la formation en kinésithérapie depuis la « liquidation » de son unique promoteur, les balbutiements de l’Institut d’Études africaines, ainsi que le désordre progressif dans diverses autres filières devraient interpeller chacun.

Si les frais de scolarité sont investis dans les procès, les marchés fictifs et autres trafics, il y a fort à craindre que l’UdM ne se transforme en une boite à diplômes sans contenu comme nombre de maisons d’enseignement au Cameroun; que l’UdM qui envisageait de faire la différence par le haut devienne championne dans la différence par le bas. On risque de passer de l’utopie à l’illusionnisme, à la tromperie sur la marchandise. Et les spécialistes de la pensée gastronomique ou d’autres manœuvres frauduleuses de Bangangté le savent bien, le poisson pourrit par la tête. Regardez bien la hiérarchie putride de cette institution.

Alexie Tcheuyap

Source: Germinal, édition spéciale, n°114, du 21 mars 2018

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