CAMEROUN: ÉTAT POLICIER OU ÉTAT DE DROIT?
Il y a un moment où en Afrique les dictateurs assumaient leur statut d’autocrates, de totalitaires et se revendiquaient guides, timoniers ou s’autoproclamaient généraux, maréchaux, président à vie et même empereurs. Comme les choses ont changé !
Aujourd’hui, pour être fréquentables et paraitre aux yeux du monde comme des hommes policés afin d’être fréquentables, les mêmes dictateurs ou leurs avatars, ont subrepticement transformé leurs Etats en Etats policiers, mais se sont couverts des oripeaux de la démocratie, devenant ainsi plus féroces parce que plus subtils et plus pernicieux.
Suivez les discours des dictateurs les plus indécrottables d’Afrique et comptez le nombre de fois qu’ils se revendiquent comme étant à la tête des pays démocratiques, respectueux des droits humains et des exigences de l’État de droit.
L’État de droit, comme vous le savez, s’oppose à l’État policier ou de police. Un État policier est un État autoritaire qui, pour maintenir les citoyens dans la peur et faire respecter les prérogatives du pouvoir politique, utilise la police et en particulier la police secrète, allant jusqu’à faire usage de moyens violents et arbitraires pour faire régner l’ordre. Il se distingue spécifiquement par ses caractéristiques totalitaires et l’utilisation de moyens radicaux pour assurer le contrôle social. Là-bas, le cercle répressif (hommes de commandement, hommes en tenue, justice) est aux petits soins pour accomplir les basses besognes avec un zèle intéressé. Ni la police ni l’État n’y sont soumis aux règles de l’État de droit.
Les autorités publiques, affranchies de tout contrôle, détiennent des pouvoirs exorbitants. C’est ainsi que Carré de Malberg soutient que l’État de police est celui dans lequel l’autorité administrative peut, d’une façon discrétionnaire et avec une liberté de décision plus ou moins complète, appliquer aux citoyens toutes les mesures dont elle juge utile de prendre par elle-même l’initiative, en vue de faire face aux circonstances et d’atteindre à chaque moment les fins qu’elle se propose.
En d’autres termes, les actes que l’autorité administrative pose ne sont pas toujours autorisés par loi. Cependant, il convient de préciser que l’État de police peut aussi être un Etat de droit mais pas au sens moderne de l’expression, mais d’un droit manipulé, instrumentalisé dont l’autorité administrative tord le coup pour lui faire dire ce qu’elle entendre à chaque fois qu’elle poursuit et veut atteindre un but spécifique.
Un État policier est État de suspicion et d’inquisition où toute velléité d’opposition est considérée comme une hérésie et combattue comme telle par une procédure particulière (inquisitoriale) où l’enquête est assaisonnée par les injures, les intimidations, coups de poings, de pied ou de crosse, la violence et la torture multiforme.
(A suivre : l’État de droit)
Source: Jean Takougang