CAMEROUN – PRÉSIDENTIELLE 2018: LA CLÉ DU SUCCÈS DE L’OPPOSITION
Dans l’article du 18 mai 2018 intitulé «Présidentielle 2018 – Appel à l’intelligentsia camerounaise», je mentionnais que le seul adversaire du peuple camerounais était ce régime Rdpc et que, par conséquent, aucun candidat de l’opposition ne devrait être blâmé par un autre ou par le peuple pour quelque raison que ce soit, car cela contribuerait à fragiliser l’opposition dans son ensemble et à renforcer l’adversaire unique, alors même que tout opposant qui arrive au pouvoir règle par ce fait même la question de l’alternance qu’attendent les Camerounais depuis 1992.
Je mentionnais aussi, dans le même article, la nécessité, pour tous les candidats de l’opposition, d’aller aux élections municipales et législatives en rangs dispersés pour s’assurer un nombre de députés à l’Assemblée nationale qui leur permettra de participer au dialogue national après la présidentielle. Je soutenais que si les partis d’opposition se rassemblaient autour d’un candidat unique avant d’avoir obtenu leurs députés lors des législatives, ils couraient le risque d’être plus fragiles après l’élection présidentielle.
Cette idée scellait, une fois pour toutes, la question de la coalition de l’opposition jusqu’à ce que le régime de Yaoundé décide de renvoyer les législatives et les municipales à une date ultérieure. Le faisant, le pouvoir mettait de nouveau l’opposition devant ce sempiternel défi de se coaliser contre lui. Mais voilà qu’à deux semaines de l’élection présidentielle, les huit candidats reconnus de l’opposition évoluent toujours en rangs dispersés. Les alliances se tissent, mais jusqu’ici avec des formations qui n’ont pas de candidats à la présidentielle, un nouvel adage populaire étant aussi né: «La coalition se fait d’abord avec le peuple.»
Il faut voir dans cet adage la manifestation du génie Camerounais. C’est l’expression forte de la volonté de se frotter à l’expérience du terrain pour lever la foule. Et voilà que cette foule, muette depuis la victoire volée de Fru Ndi en 1992, s’est définitivement réveillée avec les grands meetings de Maurice Kamto du Septentrion du Sud, avec l’entrée radieuse de Cabral Libii au Littoral, la percée de Joshua Osih à Dschang, Obala et ailleurs. Partout, les candidats lèvent, loin de leurs fiefs, des foules qu’on n’avait jamais imaginé voir aussi déterminées. Ce qui en fait l’élection présidentielle la plus frénétique de l’histoire du Cameroun.
Si ainsi, la coalition entre les huit candidats de l’opposition relève de nouveau du rêve, il faut y voir la volonté légitime de chaque parti de s’implanter, à travers le contact avec les populations, sur tout le territoire national, dans la mesure où il existe une et une seule condition pour remporter, même à la majorité relative, cette élection à un tour devant le Rdpc : c’est d’être présent dans tous les bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire national, afin de permettre, aux électeurs floués depuis 36 ans, de choisir entre le candidat du régime qui, de toute façon, sera présent, et les candidats de l’opposition qui, lors des échéances des 20 dernières années, étaient absents. Et c’est ce qui explique le dernier rallye d’implantation du MRC du nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, bien avant le lancement de cette campagne.
Ceci étant, rien n’est gagné avant la date fatidique du 07 octobre 2018, même si des tendances se dessinent. Le peuple répond présent à tous les candidats. Il se lève pour quiconque vient. Mais si le peuple se lève, ce n’est pas nécessairement pour faire du candidat qui se présente à lui le futur président de la république.
S’il se lève, c’est parce qu’il voit en ce candidat celui qui réalisera son rêve de faire partir Paul Biya. Cette compréhension de la psychologie populaire met les partis d’opposition dans l’obligation de re-définir l’idée de la coalition.
À ce sujet, le décor étant planté comme décrit ci-dessus et l’élection étant à un tour, la coalition ne peut plus consister en ce que les partis politiques de l’opposition se mettent ensemble pour aller à l’élection présidentielle du 07 octobre 2018. Elle consistera plutôt en ce que tous ces partis de l’opposition reconnaissent et soutiennent la victoire du candidat de l’opposition qui arrivera en premier.
Il s’agira surtout, pour les sept autres partis, de reconnaître et de soutenir ce parti d’opposition vainqueur dans le cadre d’une revendication en cas de vol, vol que redoutent tant les Camerounais. Ceci implique la mise sur pied d’une plateforme post-électorale de revendication de la victoire de l’opposition dans laquelle s’investiront tous les huit candidats munis des procès-verbaux. Le candidat qui, devant la vérité des urnes et la conformité de ces procès-verbaux, ne soutiendra pas le candidat vainqueur de l’opposition portera sur lui la responsabilité historique de la trahison du peuple. Telle est la clé du succès pour l’intérêt général de la nation.
Maurice NGUEPÉ
Le 24 septembre 2018