Le ricanement nègre dans l’enseignement de Fabien Eboussi Boulaga
La crise du Muntu de Fabien Eboussi Boulaga, l’un des philosophes majeurs sinon le philosophe par excellence de la seconde moitié du Xxème siècle en Afrique, a profondément renouvelé la pensée contemporaine qui était au prise avec l’ethnophilosophie et qui avait du mal à comprendre le mouvement de la négritude. Ses travaux sur le christianisme sans fétiche, sur la vérité, sur la philosophie du christianisme, la chair et la subjectivité de la transcendantale, sur la culture, sur la phénoménologie matérielle, sur la démocratie, sur le mensonge comme impasse d’une société, pour ne prendre que ces thématiques centrales, ont eu d’importantes répercussions dans tous les champs de la culture négro-africaine et même dans ce que personnellement je nomme le tournant ethno-philosophique de la philosophie en Afrique. La critique de l’objectivisme galiléen et des idéologies scientistes, la dénonciation des formes politiques, médiatiques et culturelles de la barbarie moderne, l’affirmation de la primauté de l’individu vivant contre toutes les abstractions économiques, réifications techniques ou hypostases sociales ont conduit Fabien Eboussi Boulaga à défendre la Vie dans toute sa plénitude, à célébrer les valeurs de l’Esprit, de l’Art et de la Culture jusqu’à la Vérité de la Vie absolue portée par les Paroles du Christ même quand il a interroger le Christ lui-même sans complaisance. Le monde intellectuel africain lui a rendu un hommage de son vivant mais il gagnerait aujourd’hui à le relire lui qui disait encore il y a quelques jours que s’il avait un dernier mot à dire en guise de conseil c’est : « lisez » Fabien Eboussi Boulaga était un phénoménologue et un historien de la philosophie, discipline qu’il a embrassé dans sa propre rencontre avec Platon et le mythe, lui l’homme de la phénoménologie de l’esprit chez Hegel, il a passé au peigne fin Nietzsche, Husserl, Heidegger notamment.
Il a vu l’Afrique immense voilà pourquoi il s’est jeté corps et âme dans la théologie, les sciences de l’homme et de la vie, la psychologie et la psychanalyse, l’économie politique, l’esthétique et la sociologie, l’éducation et la thérapie, l’éthique et la politique. Je ne voudrais pas ne pas goûter à ce plaisir de la citation pour terminer : « la tradition En fait elle pose son être rationnel comme un être pour autrui ; elle emprunte les discours rationnels de l’autre, tire de soi des philosophies complètes qui ont la forme et même le contenu de celles dont elle voudrait se démarquer ». Où nous situons nous ? Vincent Sosthène Fouda