Genève de ma tristesse

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Il est bien entendu que ces Camerounais déjà étiquetés « terroristes » par quelques pilleurs ou receleurs des ressources du pays, ont raison de manifester leur mécontentement, comme ils le peuvent, à l’égard de M Biya, dont malgré tous les égards, on peut douter au moins pour trois raisons, de la légitimité en tant que Président du peuple camerounais. 


1) non seulement M. Biya n’a pas pu se distancer de la tête de son parti afin d’agir et d’être perçu comme Président de tous les Camerounais, mais en plus, il a transformé l’administration publique camerounaise qui appartient aux citoyens, en une cellule géante du RDPC, par un subtile chantage sur les carrières des agents publics, faisant ainsi de l’Etat du Cameroun un Etat-parti, et du RDPC un parti-Etat ; 
2) il a systématisé sa victoire automatique et éternelle à toute élection, à travers un système électoral dolosif à l’égard de l’électorat ; 
3) il ne peut pas justifier par un minimum de bien-être induit de sa gouvernance le pouvoir qu’il arrache régulièrement à ses adversaires. On n’en veut pour preuve supplémentaire que son incapacité actuelle à créer en interne les conditions d’un dialogue entre ses compatriotes qui souffrent de la guerre, et la maladroite justification que les organiques du parti au pouvoir veulent donner à sa présence en Suisse, relativement à des négociations (sur quoi ?) qui s’y dérouleraient entre un médiateur sans mandat (semble-t-il, et de qui d’ailleurs?) et des groupes de sécessionnistes.
Quand un Chef a quelque empathie pour son peuple et veut sa conciliation à travers un dialogue inclusif, il lui fait l’honneur de l’annoncer lui-même, en en indiquant l’objet et la procédure. Il ne se cache pas comme un dissident, dans son domicile étranger, pour parlementer incognito avec des étrangers qui se veulent des « médiateurs» (entre lui et son peuple sans doute ?!). Il nous semble aujourd’hui qu’en tant qu’entité anglophone, nos frères d’outre-mungo, y compris les séparatistes (de circonstance), veulent négocier avec le gouvernement camerounais, leurs conditions de participation à un dialogue national où serait discuté entre autres, une forme nouvelle et endogène de l’Etat camerounais. 
Mais, pour revenir aux manifestations camerounaises de Genève, je dois à l’objectivité de rappeler à ceux qui se disent « Brigade anti-sardinards», que si la marche publique est un droit citoyen universel permettant aux gens d’exprimer déception ou satisfaction à l’égard d’un pouvoir, elle est régie par des normes à la fois philosophiques et juridiques nécessitant un minimum de discernement pour y recourir. Par exemple : 
a) si la marche de Genève visait à déloger M. Biya d’un hôtel où il est logé par la volonté et sous la protection du gouvernement suisse, cela ne pouvait se faire sans violence, et fatalement ce serait improductif pour le changement qu’attend le pays, car ce n’est pas tant Paul Biya que le régime qu’il faut changer.
b) si par contre elle voulait exprimer au gouvernement de la Suisse, le souhait des Camerounais que leur Président n’y vienne plus dépenser la fortune publique du Cameroun pour s’y soigner et reposer, au lieu de construire des hôpitaux performants au pays, alors, il eût été sage de respecter l’itinéraire indiqué par les autorités suisses qui conditionnait l’autorisation de la marche. Car les autorités suisses ne souffrant pas du même autisme que M. Biya, auraient bien compris le message. Tout comme le reste du monde d’ailleurs, puisque la marche était en mondovision.
Ne pas comprendre que la violence gratuite décrédibilise leur action et fragilise potentiellement leur liberté, jette le trouble dans la résistance intérieure qui, à notre connaissance, se veut pacifique en se distançant des actes de violence malgré les provocations. Il doit pourtant y avoir dans la diaspora camerounaise des gens qui comprennent que l’essentiel dans une résistance qui n’est pas insurrectionnelle est bien dans la tête, et non dans les muscles, fussent-ils herculéens.

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Source: Jean Baptiste Sipa

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