Religions et politiques : Les amants maudits de l’espace public au Cameroun

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Religions et politiques : Les amants maudits de l’espace public au Cameroun.C’est une gageure d’écrire sur le thème religion et politique. D’une part, le sujet est si vaste qu’une vie n’y suffirait pas. D’autre part, l’étude du thème est séculaire et, depuis les pères fondateurs de la sociologie — Durkheim et Weber —, qui ont bien montré l’un comme l’autre les conséquences des comportements religieux sur l’activité sociale, voire politique, les analyses se sont multipliées, si bien que le risque de redondance est élevé. Enfin, et c’est sans doute ici le risque le plus important, on peut se demander si l’étude du thème religion et politique est encore pertinente. Tant de travaux ces dernières années ont remis en cause cette articulation qu’il faut être un peu téméraire pour se risquer là où des maîtres ont déjà tout dit. S’inscrivant résolument dans une problématique de la modernité — travaillée par le religieux —, remettant en cause le désenchantement du monde, ils insistent sur l’autonomisation des croyances et la fécondation du politique par le religieux et du religieux par le politique.
Au Cameroun cependant je fais office de pionnier dans l’observation et dans l’analyse de ceux que je nomme les amants maudits de l’espace public au Cameroun.
La nation est le groupe politique conçu comme une collection d’individus, et c’est en même temps, en relation avec les autres nations, l’individu politique. C’est pourquoi la nation est incompatible avec les religions de type camerounais.
Trois éléments pour aller au plus vite, situent résolument la nation du côté de l’autonomie démocratique. Tout d’abord à l’encontre du principe hiérarchique caractérisant les sociétés organisées en ordres et en états, la nation naît du transfert sur la politique d’une revendication d’égalité.
Quelle que soit sa définition subjective, elle se pense comme une communauté d’égaux. Fraternité ou camaraderie, son imaginaire est horizontal.
L’avènement de cette légitimité nationale nouvelle accompagne le processus d’affranchissement démocratique des individus qui, devenant citoyens, s’émancipent à terme de leur tutelle traditionnelles, communautaires, religieuses. En affinité avec la dynamique d’égalisation des conditions, la nation devient le lieu exclusif de leur volonté politique. , Cette même égalité est conjointement revendiquée dans les relations entre nations, faisant ainsi naître l’enjeu de reconnaissance, exacerbé dans les cas de déni.
Dans le mouvement religieux conduit par le pasteur Lottin A Samè dès 1922 intègre fondamentalement ce principe égalitaire comme nous pouvons le découvrir dans les centaines de cantiques à la « negro spiritual » qu’il compose et intitule Esew’a Bosangi. Dans un langage holiste, du romantisme politique, il valorise tradition camerounaise, religiosité et passé. Lottin A Samé, figure oublié de la lutte pour l’émancipation des camerounais, a été de ce fait le chantre de l’âme du peuple camerounais.
Les multiples assassinats des hommes d’Église au Cameroun essentiellement chez les catholiques sont la preuve si besoin est  du manque de distance aujourd’hui entre l’Église, les religions en général et la politique. Les responsables de l’Église fonctionne en copain et en coquin refusant de ce fait de vivre un humanisme intégral et solidaire pourtant “Rerum Novarum” est plus qu’actuel. Avoir une célébration eucharistique à l’Assemblée Nationale lors des obsèques de monsieur Yene Ossomba Victor n’a pas seulement été une erreur. C’est une entorse à la fois fondamentale qui régit le fonctionnement de nos institutions et organise notre vivre ensemble en consacrant la laïcité de notre pays dans ses institutions. Le peuple a une responsabilité aussi s’il ne veut pas être enfermé dans l’ignorance c’est à dire être mis hors de son dessein et de celui des religions qui est d’être au service de l’entière vérité de l’homme et non d’être un cercle de rencontre occulte pour renforcer l’oppression. La Conférence des Evêques du Cameroun qui s’est ouverte mercredi et qui s’achève ce samedi devrait éviter de s’inféoder au monde comme semble le présenter son glissement actuel.
A quoi s’occupe l’Église aujourd’hui ?
Beaucoup de se posent la question de savoir à quoi s’occupe l’Église aujourd’hui ? Si l’on désigne facilement les œuvres sociales comme les écoles et les dispensaires la doctrine sociale de l’Église catholique s’effrite. Pourtant elle devrait être l’acte essentiel et permanent que l’Église rend aux homme et aux femmes de notre temps selon le style de dialogue par lequel Dieu lui-même, en son Fils unique fait homme « s’adresse aux hommes (…) ainsi qu’à ses amies (cf. Ex 33 ; Jn 15, 14-15), il s’entreitne avec eux (cf. Ba 3, 38). L’Église catholique dans notre pays donne l’impression d’être à bout de souffle, qu’elle ne lit plus et ne s’inspire plus de la Constitution pastorale « Gaudium et spes » dont Mgr Jean Zoa fut pourtant un des rédacteurs.

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Ce document d’une grande richesse, considère lui l’homme comme l’axe de tout son exposé, l’homme « dans son unité et sa totalité, l’homme, corps et âme, cœur et conscience, pensée et volonté ». Dans cette perspective, « aucune ambition terrestre ne pousse l’Église; elle ne vise qu’un seul but: continuer, sous l’impulsion de l’Esprit consolateur, l’œuvre même du Christ, venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité, pour sauver, non pour condamner, pour servir, non pour être servi ». Grâce à ce document, l’Église entend fournir une contribution de vérité à la question de la place de l’homme dans la nature et dans la société, affrontée par les civilisations et les cultures dans lesquelles s’exprime la sagesse de l’humanité. S’enracinant dans un passé souvent millénaire, celles- ci se manifestent sous les formes de la religion, de la philosophie et du génie poétique de tous les temps et de tous les peuples, en offrant des interprétations de l’univers et de la convivialité humaine et en tentant de donner un sens à l’existence et au mystère qui l’entoure.
Qui suis-je? Pourquoi la douleur, le mal, la mort, malgré tous les progrès? À quoi servent tant de conquêtes si leur prix est bien souvent insupportable? Qu’y aura-t-il après cette vie? Ces questions de fond caractérisent l’itinéraire de la vie humaine. À cet égard, on peut se souvenir de l’exhortation « Connais-toi toi-même », sculptée dans l’architrave du temple de Delphes, qui témoigne de la vérité fondamentale selon laquelle l’homme, appelé à se distinguer d’entre tous les êtres créés, est homme précisément dans la mesure où, de par sa constitution, il est orienté vers sa propre connaissance. Face aux questions auxquelles notre société fait face aujourd’hui le peuple de Dieu est en droit de s’interroger et je même il est légitime pour lui de ne plus vouloir se contenter des Unes de Cameroon Tribune et des scandales sans réponse dans les Eglises.
Maintenant, il n’appartient pas au sociologue de prédire la manière dont évoluera le couple religion-politique durant les prochaines années au Cameroun. Nous pouvons toutefois souligner que la multiplication des groupes religieux, la multiplication des scandales,  le silence de l’Église face aux accusations de pédophilie ce certains de ses prêtres, que l’Église peut difficilement réguler, amène à penser que l’Église est inféodée dans le pouvoir en place au Cameroun. De même, nous ne pouvons pas ignorer l’entrée au Cameroun d’un Islam sunnite qui risque d’engendrer de nouvelles configurations du couple religion-politique. Dans une conjoncture où l’islam s’implante durablement par la finance, la construction des Mosquées et où les fondamentalismes religieux s’emparent des territoires où l’État est absent, nous peuvons penser que le couple religion-politique est encore voué à de nombreuses transformations. Le travail du sociologue est donc loin d’être achevé… sur terre et non dans les cieux.

Prof Vincent-Sosthène FOUDA socio-politologue 

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