John Fru Ndi: « Paul Biya doit être traduit devant la CPI pour crimes contre l’humanité »

A 76 ans, l’opposant historique du Cameroun a vieilli. Sa parole n’est plus aussi écoutée qu’en 1990, à la création de son parti, lorsqu’il soulevait des foules entières sur tout le territoire national. Mais, depuis le début de la crise anglophone, en octobre 2016, il a multiplié les appels et les interviews pour dire le mal-être de cette région dont il est originaire.

 

En février, il a profité d’une invitation du président de la République après le sacre, en janvier, des Lions indomptables, l’équipe camerounaise de football, à la Coupe d’Afrique des nations pour lui rappeler l’urgence de la situation. En vain. Dans cet entretien, John Fru Ndi assure qu’il est « trop tard ». « Paul Biya ne m’a pas écouté. Tout a empiré », regrette le vieil opposant.
Dimanche 1er octobre, les jeunes des deux régions anglophones sont descendus dans les rues pour proclamer leur « indépendance » symbolique. Les forces de l’ordre ont répondu par des gaz lacrymogènes et des tirs à balles réelles. Amnesty International et des sources officielles font état d’un premier bilan de 17 personnes tuées.

Comment avez-vous vécu cette journée de dimanche ?
John Fru Ndi Quand les jeunes ont voulu descendre dans les rues, je leur ai donné ma bénédiction. J’avais vu les choses arriver. On pouvait les éviter. Souvenez-vous, j’ai supplié Paul Biya. Au palais d’Etoudi, en février, lorsque Paul Biya m’a salué, j’ai tiré sa main vers moi. Je lui ai parlé : « Monsieur le Président, si tu peux payer de l’argent, faire libérer les otages et négocier avec Boko Haram, tu peux aussi pardonner ton propre peuple. » Mais il ne m’a pas écouté. Au lieu de cela, j’ai été accusé de vouloir empêcher que les « criminels » [anglophones] qu’ils avaient arrêtés soient jugés.

Vous avez vu ce qui est arrivé hier [1er octobre] ?

Dans tous les coins qu’ils pensaient inaccessibles, les jeunes ont commencé à marcher, même dans le village du ministre Elvis Ngolle Ngolle. Les gens n’avaient plus peur.

Vous croyez que j’en suis heureux ?

Non, et Monsieur Biya est la seule cause de tout ça.
Au moment où les anglophones descendaient dans les rues, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti au pouvoir, organisait des marches dans huit des dix régions du Cameroun pour vanter l’unité et la paix
Voilà ce qui arrive dans mon pays et je condamne l’idée que des membres du bureau central du RDPC, des membres du Sénat, de l’Assemblée nationale, se réunissent au lieu de chercher la solution. Voilà pourquoi les anglophones pleurent et disent tous les jours qu’il n’y a pas de lois au Cameroun. J’étais très content des marches des jeunes anglophones. Car si ton père ne veut pas t’écouter, tu dois te battre toi-même.

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