Don d’ordinateurs au étudiants camerounais: Initiales PB (Paul Biya) inscrites sur chaque ordinateur fabriqué

Un «virus» nommé PB est incrusté dans chaque exemplaire qui sera remis aux étudiants camerounais dans le cadre du projet «E-National Higher Education Network».

On ignore toujours quand va débuter la distribution des cinq cent mille ordinateurs du projet «E-National Higher Education Network». A en croire un communiqué du ministère de l’Enseignement supérieur qui pilote ce projet, les premiers quatre-vingt mille ordinateurs devraient être à Yaoundé le 27 de ce mois de décembre. Une mission chargée de la réception du produit séjourne depuis plusieurs semaines à Shenzhen en Chine. Avec le début de la distribution de ces machines, les questions autour de la signification des lettres «PB» incrustés sur chacun de ces ordinateurs et leurs emballages devraient se multiplier. Dans la délégation camerounaise partie en chine pour réceptionner les machines, on ne cache pas que «P» et «B» sont les initiales de Paul Biya, le président de la République du Cameroun. Les étudiants apprécieront.

Opportunisme
Depuis plus d’un an, Jacques Fame Ndongo, le ministre de l’Enseignement supérieur (Minsup), qui se

présente comme une créature de Paul Biya, tente en effet de transformer un projet gouvernemental en un don du président de la République. En juillet 2016, c’est d’ailleurs lui qui sort du chapeau, le fameux «don du chef de l’Etat de 500 000 ordinateurs portables à tous les étudiants camerounais» détournant le projet «E-National Higher Education Network» de son objectif initial. «Le projet « E-National Higher Education Network » s’articule autour de deux axes: le don de 500 000 ordinateurs octroyés à tous les étudiants dûment inscrits dans les huit (08) universités d’Etat et les 215 instituts privés d’enseignement supérieur réglementairement agréés par la Commission nationale de l’enseignement supérieur privé d’une part, la construction de neuf (09) Centres de développement du numérique universitaire dans chaque université d’Etat et à l’université inter-Etats Cameroun-Congo (site de Sangmelima) qui ouvrira ses portes à la rentrée académique 2017/2018, d’autre part», insistait-il encore dans un communiqué le 12 avril dernier. Pourtant quand l’idée nait dans la tête de Zhao Dhezi, il n’est guère question de don d’ordinateur. Fin août 2015, quand le directeur général de la Sichuang Communication
Telecom Construction Company le présente aux autorités camerounaises, il s’agit d’un projet d’interconnexion de toutes les universités d’Etat du Cameroun. «La mise en réseau des universités camerounaises vise à arrimer le Cameroun aux normes de l’enseignement numérique international. Tenez par exemple un enseignant qui se trouve au Minesup et enseigne à l’Université de Yaoundé II pourra dispenser son cours à partir de son bureau à ses étudiants dans l’amphithéâtre et il sera vu dans toutes les universités du Cameroun sans avoir besoin de se déplacer», explique alors Zhao Dhezi au sortir de l’audience avec le Minsup.

Manipulation
La délégation chinoise dit même être «au Cameroun pour faire le point de ce projet pour lequel un accord cadre de prêt de 75 milliards de francs CFA a été récemment signé en Chine entre le ministre chinois du Commerce et le ministre camerounais de l’Economie». Car apprend-on alors, il ne reste plus que le décret du chef de l’Etat pour entamer les travaux. Celui-ci tombera un an plus tard alors que Fame Ndongo avait déjà modifié le contenu du projet. L’interconnexion des universités d’Etat verra-t-elle le jour? Rien n’est moins sûr. Surtout que dans leurs communications, les autorités se sont bien employées à faire admettre à l’opinion que ce sont les cinq cent mille ordinateurs à distribuer aux étudiants qui couteront 75 milliards de francs CFA. Et pourtant, le décret du président de la République habilitant le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire a signé avec Eximbank Chine un accord de prêt pour le financement de ce projet est clair: c’est l’ensemble du projet «E-National Higher Education Network» qui se chiffre à 937 500 000 Yuans RMB, soit environ 75 milliards de francs CFA. Comme avec les avions, il n’est donc pas exclu qu’une affaire d’ordinateur chinois éclate un jour.

Aboudi Ottou

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