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A PROPOS DES PRESIDENTIELLES : ET SI ON ETAIT DANS UNE FEDERATION ? – Icicemac

A PROPOS DES PRESIDENTIELLES : ET SI ON ETAIT DANS UNE FEDERATION ?

On choisit la forme de l’Etat sur la base de ses avantages, et pour cela, on compare point par point les formes en concurrence. De ce point de vue, la Fédération est supérieure à tout point de vue sur l’Etat unitaire. II n’existe aucun aspect pour lequel l’Etat unitaire présente le moindre avantage. Aucun, que ce soit sur le plan politique, économiques, social, de l‘unité et de la paix.

Prenons le cas actuel où les Camerounais sont à la recherche d’un futur Chef d’Etat. Dans une Fédération, les choses sont très simples : les candidats sont des Gouverneurs des Etats fédérés ayant déjà fait au moins un mandat.

Ces gouverneurs ont été élus par leurs populations, ils ont fait leurs preuves dans la gouvernance publique d’une entité étatique et dans la gestion de la diversité dans leur Etat. On les connait ; tout le monde les a vus faire, tout le monde peut les juger sur des faits.

Quoi de plus naturel qu’après avoir fait leurs preuves au niveau régional, qu’on puisse leur faire confiance au niveau fédéral ?

C’est propre, digne, consistant, sérieux.

Mais quand on a des troubadours comme ceux qui écument le Cameroun unitaire, où n’importe quel ouistiti se lève pour être Président, vous pouvez avoir quel sérieux ?

 

TIRER LES LEÇONS DE L’HISTOIRE ET DES AUTRES

Avant de croire à la comédie que nous nous jouons pour la démocratie, il est important de jeter un coup d’œil sur l’histoire de nos pays et tirer froidement les leçons qui s’imposent. Les changements de pouvoir en Afrique sont difficiles et se font le plus souvent par la violence : coup d’Etat, rébellion, insurrection…

Cette tendance générale en Afrique, prend une tournure singulière en Afrique Centrale qui ajoute aux problèmes intrinsèques du pouvoir dans les Etats coloniaux, une sociologie très fragmentaire. Dans cette zone, il existe très peu de transitions pacifiques, si on exclut les épisodes centrafricains menés sous l’autorité des puissances étrangères, notamment la fameuse communauté internationale.

On peut aussi citer, le remplacement de Léon Mba mourant par Bongo sous l’égide de la France, mais également le choix de Biya par Ahidjo. Mais on voit bien là où cela nous conduit : un coup d’Etat sanglant de l’entourage d’Ahidjo qui lui reprochait d’avoir céder ce pouvoir.

C’est dans ce cadre intrinsèquement violent et brutal qu’il faut placer la transition qui se dessine au Cameroun. S’imaginer un seul instant qu’avec un pouvoir aussi concentré, le système gouvernant peut renoncer volontairement au pouvoir relève d’une vision très naïve : même battus de manière claire et indubitable, ils ne sortiront pas d’Etoudi pour vous laisser entrer, à moins d’y être contraints par les armes. Ils ont trop à perdre et ils résisteront jusqu’au bout, contre le bon sens, la raison, les pressions et la menace de guerre qu’ils ne craignent pas.

Exactement comme cela se fait au Gabon, au Tchad, au Congo, en RDC, au Burundi, au Rwanda, etc.

Exactement la même chose, car la configuration est la même, la sociologie la même, situation politique la même.

On ne peut donc aborder correctement le problème de la transition au Cameroun qu’à partir de ces principes fondamentaux. Et il est important que l’opposition se ressaisisse en comprenant les vrais enjeux : les élections à venir ne peuvent que consacrer Biya ou ses successeurs.

Quand à a cela, on ajoute la spécificité du pouvoir monstrueux de nos Chefs d’Etats, cette succession sera presqu’à coup sûr bio-dynastique ou ethno-dynastique. Dans ces conditions, l’opposition ne peut espérer au mieux que quelques strapontins pour jouer un rôle de faire-valoir et de cosmétique démocratique, mais rien de plus.

Le système tel que je décris n’est pas seulement camerounais. Le mal n’est pas dans une malfaisance particulière de Biya ou de son entourage, mais dans la logique de l’Etat postcolonial appliqué à un environnement segmentaire, rationné et violent, où les gens jouent la comédie de l’unité nationale. On le retrouve partout et sa caractéristique est qu’il ne connaît que des chefs de guerre, de vieux dictateurs, des successions dynastiques ou de graves instabilités.

Ce n’est pas un hasard : cette situation exprime parfaitement l’incompatibilité d’un système politique normal avec un Etat dit « unitaire » appliqué dans un environnement segmentaire, pauvre et très rationné.

Ma défense énergique du modèle fédéral ne vient donc pas seulement de sa large supériorité économique, de sa capacité à assurer l’unité nationale ou des raisons spécifiques du cas anglophone. Il apparait aussi comme le seul moyen d’assouplir cet arrimage pathologique sur le pouvoir d’Etat qui rend impossible toute vie politique normale.

En remettant aux Etats Fédérés toutes les missions opérationnelles, la Fédération permet aux citoyens de focaliser l’essentiel de leur attention sur le Gouvernement Régional à qui ils demandent l’essentiel des comptes. Cela permet d’entretenir une vie politique très intense, ce qui réduit la tension au sommet de la Fédération qui peut désormais se consacrer à des activités stratégiques de haut niveau, de haute importance et de haute technicité :
-la défense, les affaires étrangères, la coordination et les politiques macroéconomiques
-les infrastructures qui profitent intrinsèquement à toutes les Régions (autoroutes, chemins de fer, barrages)
-la recherche et la collecte des ressources

Ces missions ont, par nature, la caractéristique de profiter à l’ensemble du pays, sans qu’on puisse préférentiellement les diriger en faveur d’une communauté, ce qui réduit l’énorme attractivité du pouvoir d’Etat et des pulsions de le confisquer ou de l’arracher, rendant alors possible une vie politique normale et une démocratie apaisée au sommet de l’Etat.

Dans les conditions actuelles, Les gens que je vois s’agiter aujourd’hui, caressant le rêve d’entrer à Etoudi, au motif qu’ils auraient gagné les élections me font le même effet hilare que Jean Miché KANKAN.

D’abord, qui va les laisser gagner les élections ? Les sous-préfets ? Les chefs traditionnels qui ont désormais un salaire ? Les hommes d’affaires qui vivent des bricoles ? Le clergé arrosé par les pouvoirs publics? L’armée ? La Fonction Publique ? ELECAM ?

Et même si cela arrivait fortuitement, qui va les laisser entrer à Etoudi ? Nous ne sommes pas ici dans la philosophie ou les livres de droit, mais dans la réalité où c’est la force qui parle.

Ce sont de vrais blagueurs !

Il faut aller à la fédération, c’est la seule voie de sortie.

Dieudonné ESSOMBA

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