A défaut d’une coalition politique réelle, il nous faut une coalition citoyenne autour d’une entente minimale pour un vote utile.De même qu’inlassablement, nous continuerons à affirmer avec force d’une part que le Cameroun dans l’état actuel de son organisation socio-politique est non seulement dans l’incapacité structurelle de satisfaire les besoins matériels et moraux immédiats de ses populations et ne peut pas non plus ouvrir à ces dernières des perspectives historiques de développement, jusqu’à la tenue du scrutin du 7 octobre 2018, nous continuerons aussi à clamer que la seule possibilité de battre M. Biya par la voie des urnes passe par une coalition des candidats qui se réclament de l’opposition.
Nous pensons en effet au sujet du premier terme de ce qui précède que, pour relancer la dynamique de progrès réel de notre pays, il faut nécessairement comme préalable un arrêt sur image. Il faut une période de transition permettant non seulement de faire un audit général de l’ensemble de la situation, mais également de prendre les décisions idoines qui conditionnent absolument la remise de notre pays sur les rails. Pour le deuxième terme de notre propos, nous disons sans coup férir que la seule voie pouvant garantir le succès contre M. Paul Biya passe nécessairement par une coalition des candidats qui se présentent contre lui. La certitude que nous manifestons ainsi, découle comme nous allons le démontrer dans ce qui va suivre, d’une simple affaire de bon sens pratique et politique des choses.
En effet, notre pays est indépendant depuis le 1er janvier 1960. De cette date à ce jour, il a connu sans discontinuité une gouvernance qui lui a été imposée par l’étranger dans le but de dévoyer consciemment sa destinée et sa personnalité. Cette entreprise de démolition, de déshumanisation et de désarticulation a été menée de main de maitre par les hommes liges qui avaient été choisi par le maître de ce projet. Et comme nous pouvons le constater, elle a donné lieu à une zombisation de la société camerounaise qui apparaît désormais à tous ceux qui font encore preuve de lucidité et de bonne foi. Ceci malgré tous les judicieux habillages qui tentent désespérément d’occulter une malheureuse réalité que ne peuvent plus masquer ni les défilés du 20 Mai, ni les oriflammes, ni le drapeau, ni la prétendue institution présidentielle, ni le Parlement bicaméral, ni les palais, ni même les lambris dorés des bâtiments qui abritent toutes ces institutions factices qui sont par ailleurs loin d’être représentatives de notre véritable souveraineté.
Paradoxalement, c’est dans ce singulier vrai-faux et horrible décor que des compatriotes qui se présentent en rangs dispersés, sont actuellement en campagne électorale pour l’élection présidentielle du 7 octobre à l’issue de laquelle ils espèrent gagner. Curieusement, ils espèrent remporter la mise face à Paul Biya, dans un cadre électoral taillé sur mesure et qui est fait entre autre d’une élection à un tour que supervise ELECAM, une instance inféodée au pouvoir. Un pouvoir qui a nommé la majorité de ses membres. Des membres qui sont issus du RDPC, le parti-Etat dont le chef de l’Etat sortant et candidat à sa propre succession, est aussi le patron.
Tout se passe comme si tout le monde était sous le coup d’une anesthésie générale qui empêcherait les candidats à se rendre compte de ce qui est pourtant évident. En effet, après la soi-disant décolonisation du contient des années 1950-1960, en général, partout où se tiennent des élections en Afrique, et particulièrement dans notre pays où un régime politique autocratique est parvenu à cause de sa longévité a insidieusement investir tous les secteurs de la vie sociale et à pervertir la majorité des âmes, la victoire électorale ne s’improvise pas et ne peut jamais être un fait du hasard qui relèverait comme par miracle d’une sorte de génération spontanée. Le succès électoral dans ce cas-là peut être que la construction méticuleuse et méthodique d’un travail politique qui aura commencé en amont bien longtemps avant la tenue du scrutin proprement dit. Une démarche méthodologique qui est d’autant plus nécessaire que, dans le cas d’école que constitue désormais le Cameroun, le principal objectif de l’occasion que nous offre l’élection présidentielle du 7 octobre, doit être de mettre tous les atouts du côté de l’opposition qui manifestement, à cause de son inorganisation, se révèle incapable de pouvoir objectivement faire accéder le au pays à une alternative politique systémique, la possibilité de lui offrir ne serait-ce qu’une simple alternance au sommet de l’Etat.
En effet, le régime en place à Yaoundé depuis 36 ans est de facto une puissance matérielle dont les racines et l’emprise sont maintenant profondément enfouies dans la société camerounaise. Et pour abattre une telle puissance, il faut que nécessairement tous ceux qui à l’instar du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) proclament que leur profonde conviction est que le changement démocratique est possible au Cameroun par les urnes et dans la paix, aient bien en esprit pour le méditer, ce que disait le grand théoricien et praticien révolutionnaire Karl Marx. A savoir que, « …sans doute, l’arme de la critique ne peut-elle remplacer la critique des armes ; la puissance matérielle ne peut être abattue que par la puissance matérielle ; mais la théorie aussi, dès qu’elle s’empare des masses, devient une puissance matérielle ». En termes clairs encore une fois, la victoire électorale au Cameroun ne s’improvisera pas et ne sera jamais un fait du hasard relevant d’une sorte de génération spontanée. Elle sera la construction méticuleuse, laborieuse et méthodique d’un travail politique qu’on aura commencé en amont bien longtemps avant la tenue du scrutin proprement dit.
Toute chose qu’allaient malheureusement contredire les faits et la pratique de trois candidats à l’élection présidentielle dont nous taisons volontiers les noms ici, qui nous ont sollicités à les rallier à un moment où le peuple attendait plutôt de leur part, une claire conscience des enjeux politiques majeurs de ce scrutin et le savoir-faire organisationnel et politique que commande la fenêtre d’une réelle possibilité de changement que semblait de nouveau nous offrir sur un plateau après tant d’occasions manquées, ce moment de l’histoire politique de notre pays. Ces derniers ne semblaient malheureusement pas avoir compris l’enjeu majeur de ce scrutin qui a nos yeux revêt pourtant un caractère particulier. En effet, pour tous les Camerounais ayant un minimum de sens politique et de l’histoire, cette élection devrait être l’occasion de déverrouiller enfin un système hermétique qui non seulement nous a été imposé de l’extérieur, mais surtout, a réussi à faire pendant 36 ans mains basses sur notre pays. Bien évidemment, cette proposition ne pouvait prospérer car elle était contraire à ce que nous pensions. C’est donc tout naturellement que nous l’avons déclinée et nous nous sommes refusés d’y donner suite favorablement. En le faisant, nous tenions entre autres choses a avoir la conscience tranquille au sujet de la guerre civile qui se déroule depuis bientôt deux ans dans le Nord/Ouest et le Sud/Ouest et dans laquelle les camerounais se tuent entre eux.
Et ceci d’autant plus que, nous ne nous étions pas jetés à l’eau avec Christopher FOMUYOH qui comme possible candidat, avait non seulement compris dans les discussions que nous avions eues avec lui combien était nécessaire dans une perspective historique, l’instauration d’une transition d’une période de trois à cinq ans pendant laquelle tout devrait être remis à plat sur le plan politique et institutionnel, mais avait aussi et surtout compris combien sans un dialogue inclusif, le Cameroun deviendrait comme il l’est en ce moment déjà, ingouvernable et ne pouvant plus s’inscrire dans le sens du progrès réel et durable pour le bien-être de ses populations.
Toutes considérations qui objectivement à nos yeux faisait pourtant apparaître dans une certaine mesure ce compatriote comme le candidat qui pouvait le mieux réconcilier les camerounais, à cause de son parcours, de sa connaissance du terrain et des véritables enjeux auxquels le pays était confronté.
D’une part donc, au regard des conditions dans lesquelles se déroulent cette élection, et d’autre part, de la manière dont ce scrutin a été préparé en amont par une opposition décriée et qui par ailleurs pêche notamment par son manque de vision pour n’avoir pas intégré qu’elle avait en face d’elle un régime retors qui est dans ces derniers retranchements et qui de ce fait joue donc son va-tout, il nous semble que les jeux sont faits en faveur de Paul Biya ne serait-ce qu’à cause de la multitude des candidats qu’il a en face de lui.
Cependant, en dépit de tout ce qui précède, nous nous refusons de jeter le bébé Cameroun avec l’eau du bain. Nous ne pouvons rester silencieux face à ce qui va et doit résolument se jouer chez nous aux lendemains du 07 octobre.
C’est donc dans cette perspective que nous réitérons aux candidats en lice que, sans un dialogue inclusif, le Cameroun va se révéler être pour longtemps à l’instar de ce qui se passe dans des pays voisins de la sous-région, un bateau ivre, sans boussole et sans gouvernail. Chose que M. Biya qui a une conception patrimoniale et personnelle du pouvoir refuse de comprendre et commence à apprendre à ses dépens.
En effet, il se trouve malheureusement pour lui qu’avec l’élection du 7 octobre, nous sommes à un moment charnière de l’histoire de notre pays. Avec cette élection, nous devons saisir l’opportunité de créer les conditions de ce dialogue. Mais comment allons-nous le faire alors que M. Biya qui a choisi la solution du bâton va être l’heureux élu puisqu’aucun candidat de l’opposition ne peut le battre dans les conditions où se déroule ce scrutin ? Nous devons simplement imaginer une ingénierie permettant l’inversion du rapport de force politique actuel qui ne nous est malheureusement pas favorable et où en plus nous savons que la candidature unique de l’opposition est un leurre. Une fois ceci admis, pour faire bouger les lignes, il ne nous reste donc plus qu’à : a) créer une coalition minimale ; et b) amener au moins 2 des 5 poids lourds que sont Maurice Kamto, Joshua Osih, Akere Muna, Cabral Libii, Ndifor Afanwi Frankline à un socle d’entente et de mutualisation des forces dans un premier temps ; et dans un deuxième temps, de travailler politiquement à l’étendre aux trois autres pour élargir cette base afin de créer les conditions de rééquilibrage du rapport des forces politiques en présence dans notre pays en général et au cours de cette élection et surtout des élections à venir en particulier.
Il faut dire que si ce dispositif stratégique avait été envisagé et mis en place à temps comme le préconisait il y a déjà quelque temps l’Offre Orange pour l’Alternance de Hilaire Kamga, il aurait pu permettre à l’opposition de gagner sûrement ces élections et au pays de tourner surement la page du long règne de Paul Biya qui brigue aujourd’hui un 7ème mandat. Il aurait en outre bien au-delà des candidats, permis aux forces du changement de s’entendre sur le minimum qu’aurait alors pu constituer la formation d’un gouvernement de transition et de mission dont les principaux objectifs, dans la perspective de faire en sorte que le Cameroun redevienne un pays normal, auraient été dans un premier temps les suivants :
i. Restauration d’une éthique gouvernementale
ii. Le respect de la chose publique
iii. Refaire les institutions autour des valeurs républicaines
iv. Refaire la loi et le code électorale
v. Planifier un projet de développement sur 10, puis 20 ans
vi. Programmer les élections à venir.
Les premiers avantages de l’entente minimale que nous souhaitons amèneront les compatriotes à se lever comme un seul homme et à donner aux forces du changements lors des prochaines élections législatives et municipales qui se tiendront dans un an notamment, la majorité dont elles ont besoin pour entreprendre toutes les réformes institutionnelles qui sont nécessaire pour faire faire au Cameroun un saut qualificatif.
En conclusion donc de notre propos, nous souhaitons qu’une fois que les bases de la nouvelle république seront mises en place, les différents protagonistes qui y auront contribuée démissionnent des différents organes de la transition au moins un an avant, pour aller préparer des élections libres, démocratiques et transparentes qui permettront à notre pays d’amorcer une nouvelle ère de sa destinée. A l’issue de ce vaste chantier politique, c’est le Cameroun tout entier qui leur sera reconnaissant à jamais.
Le 29/09/2018
Par Paul Yamga Tientcheu et Jean-Pierre Djemba