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Réponse citoyenne au discours du Sultan Ibrahim Mbombo Njoya du 20 juillet 2019 à Bafoussam – Icicemac

Réponse citoyenne au discours du Sultan Ibrahim Mbombo Njoya du 20 juillet 2019 à Bafoussam

Il convient de préciser d’entrée de jeu que, comme tous les autres humains de notre planète, nous de la Diaspora camerounaise respectons  profondément nous aussi nos traditions ancestrales africaines et nos rois qui en sont les gardiens. Ce respect reste de mise tant et aussi longtemps que ces rois se consacreront entièrement avec équité, justice et neutralité dans leur rôle rassembleur de gardiens de nos chères traditions ancestrales, socles de notre référence existentielle dans l’humanité. 

Dès lors que ces rois s’aventurent sur le terrain de la politique qui par essence est foncièrement conflictuelle et acrimonieuse, ils deviennent des simples politiciens assujettis comme tels au débat contradictoire d’idées. Un débat de contradiction sur les positions politiques prises par un de nos rois donnera malheureusement l’impression de manquer de respect au roi, illustre gardien de nos traditions ancestrales. Toutefois, la contradiction est de façon inhérente la nature profonde du jeu de la politique auquel le roi aura délibérément choisi lui-même de s’embarquer.

Dès lors, un roi qui décide de lui-même de sortir du giron de son piédestal naturel de rassembleur neutre et de gardien de la tradition, pour s’aventure dans les débats contradictoires de la vie politique, se doit d’assumer son positionnement dans l’arène politique, en acceptant volontiers l’inévitable confrontation d’idées de ses adversaires politiques, soient-ils ses propres sujets. Sans ce débat contradictoire d’idées, le jeu politique se muerait en sclérose, pensée unique et platitude, au gré des dictats absolutistes et conservateurs de nos rois devenus subitement politiciens, c’est-à-dire partisans.

Nous Africains ne vivons pas dans une tour d’ivoire qui nous est propre, en ce qui concerne la réaction des citoyens lorsque leurs rois s’impliquent activement dans la politique de la nation.

En effet, l’histoire du monde, particulièrement celle de l’Europe, nous enseigne amplement sur la manière dont les peuples européens ont historiquement traité leurs rois qui ont tenté de dicter dans le champ de la politique.

Tout ce qui précède pour réitérer que l’objet de cet article n’est pas de manquer de respect ni au Sultan des Bamoun, ni à la poignée de rois Sardinards des Bamilékés qui l’ont accompagné au meeting de l’apologie du statu quo, organisée par le Parti politique-État de Paul Biya, le RDPC, le samedi 20 juillet 2019 à Bafoussam.

Au contraire, cet article se veut tout simplement une réponse contradictoire respectueuse et citoyenne, aux problématiques soutenues dans son discours ou en filigrane à ce discours de circonstance du Sultan Ibrahim Mbombo Njoya, l’homme politique, à cette fameuse manifestation politique du RDPC à Bafoussam.

Dans son discours  de circonstance, l’honorable Ibrahim Mbombo Njoya soumet et je le cite « l’unique champ de combat politique, c’est ici chez nous au Cameroun»  et insiste que la Diaspora ne devrait pas manifester contre le régime Biya de l’étranger, car dit-il, « Le linge sale se lave en famille»,  c’est à dire au Cameroun.

Une réponse naturelle et logique à donner au Sultan et à tous ceux qui partagent sa position ci-dessus exprimée est simple : si le seul champ de bataille de la politique du Cameroun qui compte est «ici chez nous au Cameroun», alors ignorez tout simplement ce que la Diaspora fait en dehors du Cameroun, car ça ne compterait pas! Alors, vous thuriféraires du régime Biya,  pourquoi vous agitez-vous autant pour des actions de la Diaspora camerounaise, posées  à des milliers de kilomètres du terroir national, aussi loin du seul champ de combat politique que vous prétendez pertinent?

La Diaspora Camerounaise organise ses manifestations politiques à l’étranger par défaut de ne pouvoir le faire sur place au Cameroun où toute opposition est muselée et où tout jeu politique est verrouillé par le régime dictatorial de Paul Biya.

Faut-il le rappeler à l’honorable Sultan Njoya et à tous ceux qui pensent comme lui qu’il est présentement impossible pour un parti politique de l’opposition au régime de Paul Biya, ou à la société civile à l’intérieur du Cameroun, d’organiser quelque manifestation politique publique que ce soit au Cameroun, contre le régime Biya?

Voici quelques exemples de comment «le linge sale se lave en famille» au Cameroun :

  1. Pour avoir tout simplement exercé leur droit constitutionnel de la manifestation à la place publique contre sa marginalisation, la population Anglophone aux mains nues et brandissant visiblement l’arbre de paix qui symbolise le pacifisme fut massacrée lors de sa marche pacifique du 22 septembre 2017. S’en est suivi un génocide Anglophone qui se poursuit encore aujourd’hui, nonobstant le discours creux et négationniste des thuriféraires du régime Biya et de la France à cet effet. Des milliers d’Anglophones ayant tout simplement participé à cette fameuse manifestation conforme en tout point à notre constitution croupissent toujours en prison aujourd’hui, et ce sans aucun jugement après bientôt trois années d’incarcération.
  2. Le peuple camerounais et les citoyens du monde entier sont témoins du fait que près de 5 000 Camerounais, membres du parti politique MRC croupissent présentement en prison pour avoir tout simplement participé aux manifestations pacifiques, non violentes et aux mains nues, manifestations pourtant préalablement déclarées comme l’exige la constitution de notre pays, et ce , sur place, «en famille» au Cameroun.
  3. Plusieurs demandes de manifestations de la part de l’autre partie politique de l’opposition camerounaise, le SDF ont toutes été refusées et interdites par les autorités publiques du Cameroun inféodées au régime despotique de Paul Biya.
  4. Il en est de même de la société civile qui ne peut manifester publiquement au Cameroun contre le régime en place.
  5. Etc.

En somme, les seuls partis politiques ayant le droit de parole, le droit d’organiser des manifestions publiques au Cameroun pour se faire entendre, à l’instar de celle en question que le Sultan Njoya et ses amis politiques viennent d’organiser à Bafoussam, sont invariablement et seulement les partis politiques qui soutiennent le régime dictatorial de Paul Biya, régime dans lequel le Sultan Njoya est lui-même cadre politique, en plus de siéger au Sénat  à titre de sénateur.

Ainsi, du fait du musellement et du verrouillage de tout jeu politique normal au Cameroun par le régime Biya, la Diaspora camerounaise ne peut manifester librement qu’à l’étranger! La Diaspora camerounaise manifeste singulièrement en Occident parce que  l’opportunité de manifester leur opinion politique contre le régime Biya qui leur est systématiquement refusée au Cameroun lui est systématiquement accordée en Occident.

Le comportement décrié qui est reproché dans le discours du Sultan à la Diaspora camerounaise n’est donc qu’une conséquence logique, inéluctable et directe des privations des libertés et droits fondamentaux  aux activités politiques de l’opposition camerounaise  par le régime tyrannique de Paul Biya, au Cameroun.

Tout comme la Diaspora  des autres pays du monde, la Diaspora Camerounaise ne peut se laisser muselée ou ignorer les souffrances de leurs concitoyens camerounais du terroir national, notamment le génocide de nos compatriotes Anglophones, les privations des droits et libertés politiques au Cameroun, singulièrement aux cadres du parti MRC et à 5 000 de ses membres, tous présentement incarcérés sans raison fondée et sans aucun jugement dans les prisons infestes du Régime Biya, etc.

Aussi, cette Diaspora patriotique prendra volontiers toutes  les opportunités de manifestations pacifiques qui lui sont ou seront offertes où qu’il soit, pour exprimer sa solidarité et son soutien total au peuple camerounais, dans sa quête de la liberté, de ses droits et de sa souveraineté continûment confisqués depuis 1955.

Le Sultan Ibrahim Mbombo Njoya affirme également que « Les rues d’Europe, d’Amérique, de France et de Navarre ne sont pas appropriées comme lieux d’exposition de nos querelles intestines». Soit. Ces lieux sont-ils plutôt l’endroit pour dépenser et gaspiller l’argent des misérables contribuables camerounais, par les pontes du régime prébendier et prévaricateur de Paul Biya?

Est-il nécessaire de rappeler à l’honorable Sultan Njoya que cette manifestation de la Diaspora Camerounaise qui a motivé sa rencontre de Bafoussam a eu lieu à Genève en Suisse, devant l’hôtel Intercontinental dans lequel son champion Paul Biya et sa délégation pléthorique étaient en train de dilapider l’argent des contribuables camerounais, comme ils le font allègrement à coup de plusieurs milliers de milliards de francs CFA cumulatifs, depuis plus de 37 ans?

D’où vient-il que pour les thuriféraires du régime Biya, « Les rues d’Europe, d’Amérique, de France et de Navarre » sont  appropriés pour venir du Cameroun jouir et dilapider l’argent des pauvres contribuables camerounais,  mais ne sont pas appropriées comme lieu pour dénoncer la spoliation du peuple camerounais ou demander justice?

Honorable Sultan Njoya, de quelle paix et de quel acquis au Cameroun parlez-vous dans votre discours? S’agit-il de l’absence de guerres civiles fratricides en ce moment dans le pays? S’agit-il d’une quelconque paix sociale en ce moment au Cameroun? S’agit-il d’un quelconque développement économique ou progrès social dans notre nation depuis l’avènement de Paul Biya à la magistrature suprême?

Nul ne peut réécrire l’histoire de la réalité des faits entourant le bilan catastrophique du règne de Paul Biya, qui nous tombent dessus de tous bords et de tous les côtés en ce moment au Cameroun. C’est insulter le peuple camerounais qui souffre dans l’âme au quotidien et manque de tout, que de présenter les cuisants échecs coupables du régime Biya comme étant des succès à louanger et à protéger par ce peuple martyrisé.

À l’instar des autres pontes du régime Biya et de ses supporteurs, le sultan Njoya confond malheureusement le RDPC, le parti politique au pouvoir au Cameroun, ainsi que le régime Biya, au Cameroun. Le Cameroun n’est ni le régime Biya, ni son parti politique, le RDPC. Le RDPC et le régime Biya sont plutôt les bourreaux du Cameroun. Il importe que les Camerounais restent vigilants et ne tombent pas dans le piège de cette confusion et cet amalgame si savamment entretenus volontairement par les thuriféraires du régime Biya.

Les seuls Camerounais qui connaissent  votre « paix sociale», votre «progrès social» et votre «vivre ensemble» en ce moment au Cameroun sont les prébendiers, les prévaricateurs et autres profiteurs du régime Biya qui, perchés au sommet de l’État, tel sur une mangeoire, dégustent égoïstement seuls  le gâteau national, et ont besoin du silence et de la docilité du reste des Camerounais pour perpétuer cette jouissance  égoïste du pouvoir régalien de l’État, au détriment de l’écrasante majorité des Camerounais.

En effet, toute une génération de Camerounais bien formés dans les universités du pays est d’ores et déjà une génération perdue; cette génération ira bientôt à la retraite sans avoir un jour trouvé un emploi, laissée pour compte par les errements, l’insouciance, la malgouvernance et l’incompétence chronique du régime Biya qui n’a pu développer ni les conditions ni un environnement propice pour la création des emplois pour les Camerounais. 

Honorable Sultan Njoya, ce peuple camerounais, martyrisé, opprimé et abandonné à lui-même que vous politiciens vilipendez et insultez par votre posture de l’arrogance et de l’insouciance se bat de son mieux aujourd’hui, avec la participation de sa Diaspora pour l’avènement d’un  nouveau Cameroun plus juste, plus équitables pour tous ses enfants, plus démocratique, plus garant du vivre ensemble de toutes ses différentes composantes  et pour la souveraineté du pays. Ce Cameroun, le vrai, est clairement différent de votre parti politique RDPC et de votre régime Biya qui s’est malheureusement incrusté au sommet de l’État camerounais et s’y agrippe avec votre aide, par la tricherie, les fraudes et le hold-up électoral permanent.

En somme, la paix, le vivre ensemble et le progrès social ne se décrètent pas à coups de slogans creux et hypocrites. Ces attributs positifs d’une collectivité nationale s’observent et se vivent dans la réalité des faits, comme conséquence  des actions concertées et délibérées d’une bonne gouvernance que le Cameroun n’a malheureusement pas connue depuis 1955.

En conclusion :

  1. Il ne peut y avoir de progrès ou de cohésion sociale dans notre pays sans équité, justice  et égalité pour tous nos citoyens devant la loi. Tant que le RDPC parti politique au pourvoir au Cameroun et ses affiliés seront les seuls à bénéficier des droits et libertés politiques, notamment le droit d’organiser les manifestations publiques, alors que la société civile et les  partis d’opposition à l’instar du MRC et le SDF et autres seront interdits de manifestations politiques publiques, notre pays ne connaîtra pas la paix sociale.
  • Tant que les droits et libertés politiques resteront bafoués au Cameroun et qu’elle ne pourra le faire librement au Cameroun, la Diaspora patriotique continuera à prendre volontiers toutes  les opportunités de manifestations pacifiques qui lui sont ou seront offertes où qu’il soit, pour exprimer sa solidarité et son soutien total au peuple camerounais, dans sa quête pour le changement démocratique, sa liberté, ses droits et de la souveraineté du Cameroun continûment confisquée depuis 1955.
  • La fraude électorale, la tricherie et le hold-up électoral permanent pour maintenir de force le régime Biya au pouvoir au Cameroun constituent la cause profonde à l’origine du mal-être national aux multiples symptômes que nous décrions individuellement aujourd’hui.

Il n’est jamais trop tard pour prendre conscience et revenir sur le droit chemin. L’histoire nous observe.

Que vive le Cameroun fédéral, juste, inclusif, apaisé et maître de son destin.

Michael Fogaing, Porte-parole de Diaspora pour la Modernité-Diaspora for Modernity

N.B. : 

Diaspora pour la Modernité est une organisation de la société civile de la Diaspora camerounaise, pour qui l’espoir de l’avènement de l’indépendance des institutions démocratiques les unes des autres est la pierre angulaire de son activisme politique au Cameroun. Elle est basée au Canada.

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