Ils sont les yeux, les oreilles et les bras armés du président camerounais. Depuis plusieurs décennies, des Israéliens dirigent l’unité d’élite du pays. Le site d’information African Arguments a plongé au cœur de ce système sécuritaire trouble.
En novembre 2018, Eran Moas lézarde sous le soleil des Caraïbes au bord d’une piscine à débordement posée sur l’horizon. L’Israélien s’offre des vacances bien méritées aux Bahamas, avec femme et enfants.
À 20 000 dollars (16 700 euros) la journée, la villa qu’il loue au bord de la mer n’est pas donnée, mais le prix est le cadet de ses soucis. Son portefeuille immobilier personnel comprend un appartement à New York d’une valeur supérieure à 20 millions de dollars (16,7 millions d’euros), qu’il a payé rubis sur l’ongle, et une villa à Los Angeles estimée à plus de 12 millions de dollars (10 millions d’euros). Son lieu de résidence habituel est une énorme propriété à Yaoundé, la capitale du Cameroun, où il se déplace, dit-on, dans une voiture blindée, escorté par des gardes du corps.
Ce train de vie, Eran Moas le doit à un emploi qu’il occupe de longue date au sein du Bataillon d’intervention rapide (BIR), une unité d’élite de l’armée camerounaise, mais aussi aux affaires qu’il fait avec le gouvernement local. Le BIR est placé sous les ordres directs de Paul Biya, le président au pouvoir depuis trente-sept ans. Le bataillon est réputé pour la rigueur de l’entraînement qu’il impose à ses soldats et pour l’armement supérieur auquel il a accès.
Le BIR est aussi réputé pour sa cruauté. Les organisations de défense des droits humains font état d’actes de torture et d’exécutions arbitraires perpétrés par l’unité. Un de ses anciens membres confie qu’il a personnellement assisté à deux exécutions collectives dans le nord du Cameroun, les victimes – une dizaine – ayant été obligées de creuser leur propre tombe, puis de s’y allonger avant d’être tuées.