« Soudain, Tais-toi bar eut l’atmosphère des années 1990s. L’image du Chairman plana pendant un instant on dirait Mila dansant au coin du corner en Italie. L’espoir se peignit sur les visages. Un peuple doit pouvoir rêver. Il doit pouvoir se donner des rêves à sa taille. Il fallait à toute nation des dirigeants pour les conduire au bon port. La Camerounaise en avait besoin. Le petit monde de Tais-toi bar se transforma soudain en esplanade de Bependa, où en 90, des foules burent les paroles du Chairman. Ah, notre Samalikio des temps modernes. En 1990 on disait Chairman comme on disait Um Nyobe ; on disait Chairman comme on disait superman. Il avait fait mordre la poussière à Biwondo, fidèle tortionnaire et digne successeur du Nordiste. Il avait enterré le parti unique en lançant le SDF. Celui-ci avait vu le chemin du cœur du peuple comme le but de Mila qui passe d’abord entre les jambes du gardien Chilien et file vers le but. Il faut à tout peuple des hommes qui franchissent à un moment, le pas nécessaire. Il faut à tout peuple, les briseurs de chaînes. En 90, cela voulait dire 30 ans de dictature, trente de la malédiction plantée sur la tête de la nation par Aujoulat et le colonat local. En 90 comme en cet instant à Tais-toi bar, il se dégageait une seule et même leçon : il fallait des Chairmans pour susciter des Mbarga. »168.
Note ‘Vent d’Est’ souffla au moment où la coupe du Monde et la bière rivalisaient avec les tribuns comme John Fru Ndi. Les rêves du ‘petit commerçant’ de Bamenda droguaient autant que la Jovajo, la 33 et la Kadji. Les rêves de Fru Ndi mieux avec la Kadji qu’avec la Jovajo. Les bars et les chaumières allaient aux rythmes de Suffer Don Finish. Mais lorsque le Mondial commença en Juin, soit quelques jours après le lancement du Social Democratic Front, les idéologues du régime comprirent que le moment était propice pour briser l’élan révolutionnaire dans les rues. Les plus vicieux servir à la fois les matches de football et la Jovajo. Qui pouvait encore être assez fou pour aller applaudir Fru Ndi et se voir verser dessus de l’eau empoisonnée ? Et lorsque Fru Ndi gagna les élections d’Octobre 1992 que la balance bascula du côté de la tyrannie. Yvon Omnes
C’est à Bamenda que dans en fin Octobre 1992 que j’ai commencé à écrire La Cicatrice. Yvon Omnes et la France avaient aidé à rouvrir et ouvrir nos cicatrices. Nos rêves de nouveau étaient différés. John Fru Ndi, le véritable gagnant des élections présidentielles d’Octobre 1992, était placé à résidence surveillée. J’y étais pour voir et entendre les exploits des Takembeng, cette société secrète de femmes du 3eme âge qui avaient fait fléchir les forces de l’ordre. Mais elles ne purent que faire survire Fru Ndi tout en voyant comme nous tous, nos rêves s’évanouir.
Les vrais manuels de notre Histoire enseigneront que si nos années de braises ont fini dans des vulgaires cendres froides, c’était en partie à cause du football. Dans les années 1990s lorsque les rues du Kamerun grouillent des foulent qui chantent et dansent ses héros dont Ni John Fru Ndi qui en Mais 1990 lance son SDF traduit en Suffer Don Finish, Paul Biya et son régime puisent dans les instruments d’abrutissement pour faire avorter le rêve. CRTV [Cameroon Radio and Televion] sert aux masses enfiévrées des telenovela comme Isaura et bien sur la série américaine Dynastie. La culture de la TV n’a que 5 ans d’existence au Kamerun. Des familles avec des postes de TV sont envahies par des proches, voire des voisins pour voir ces séries qui agissent sur eux comme de l’opium. Ces productions de bas étages vont inspirer les Kamerunais à commencer per Gervais Mendo Ze qui se fait écrire des œuvres que la TV nationale. Les bruits courent que le ‘mariologue’ s’est servi d’un nègre pour écrire La Foret illuminée. Est-ce le cas avec son Etoile de Noudi ? En tout cas, la seule TV nationale, la seule Radio nationale sont entre ses mains. Il s’en sert pour se vendre et vendre le régime. Il faut hélas dire que les médias publics ont aussi une mission autre que la promotion des auteurs et hommes politiques de l’ethnie. Elle est outil de perversion culturelle et de salissure politique.
Or donc, Ni John Fru Ndi et un groupe de patriotes kamerunais lancent le SDF [Social Democratic Front]. Les manifestations sont réprimées et des citoyens sont froidement assassines par les forces de l’ordre. Michel Ferdinand rappelle ainsi qu’il suit la tragédie, le lieu et les victimes,
« Après le rassemblement de Ntarinkon Park, des vagues de manifestants comment à rentrer dans leur domicile respectif. Face à cette foule, les forces de l’ordre qui ont pris position à la Commercial Avenue paniquent et ouvrent le feu. Le bilan est lourd. Six morts sont enregistrés : Edwing Jatop Nfon (couturier), Fidelis Chosi Mankam (meunier) et quatre étudiants, à savoir Mathias Tifuh Teboh, Christopher Fombi Asanji, Juliette Sikod et Evaristus Toje Chatum. »
Rappelons qu’un certain Henri Bandolo est Ministre de l’Information et de la Culture. Qui a lu La Flamme et la fumée [Yaoundé : SOPECAM, 198]. C’est avec lui que se mettent en place, les jalons de l’Etat-tribal. L’homme avait une bonne voix mais pas une tête bien faite. Revisitez son essai et vous y détecterez un discours anti-nordistes. C’est lui qui rédige et fait publier un communiqué dans lequel est inscrit un grossier mensonge. A Bamenda le 26 Novembre 1990 il y aurait eu des morts piétinés par les masses en colère contre le gouvernement camerounais. Ce mensonge sera noye dans les navets et autres insignifiantes productions intellectuelles. Mais l’arme le plus redoutable de l’enivrement des populations c’est le football.
En effet, du 8 juin au 8 juillet 1990 la Coupe du monde a lieu en Italie. L’exploit camerounais commence avec la cuisante défaite servie à l’Argentine, le tenant du titre. Suivront les exploits du vieux Mila Roger dont il est question dans l’extrait ci-dessus. En même temps que les instruments étatiques de communication tribalisent, avilissent et condamnent, le caméléon Biya se présente comme l’unificateur. Non sans envoyer des piques a ses ennemis. Le sport est un puissant moyen d’unification. La politique au politiciens et l’école aux écoliers etc. En guise de coup de grâce à Ni John Fru Ndi, vainqueur de l’élection présidentielle de 1992, l’ambassadeur de France, Yvon Omnes, accrue la puissance meurtrière des forces de l’ordre. De son hôtel Intercontinental, le suisse sabra le champagne à la santé de Fru Ndi mis à résidence surveillée. Comme la Coupe du monde, la CAN se jouera lorsque nos chaumières sont en deuil, nos frères et sœurs en exil intérieur et/ou extérieur, caches dans les brousses. La CAN se jouera lorsque les flammes de la route de Mbengwi sont à peine éteintes, lorsque les corps sont encore à la morgue.
Alors du 9 Février au 9 Mars 2022, la fête sera belle pour qui ?
Depuis la déclaration de guerre aux ambazoniens le 30 Novembre 2017 par le président de LRC [La République du Cameroun], les morts s’amoncellent, les villages brules font place aux rues des villes brules, les déplacés internes et externes sont légions. Et pourtant, dès la 9 Janvier 2022, « la fête sera belle », entend-on chanter tout partout au Kamerun sinistre. Ainsi que l’exprime le Human Rights Watch de 2021,
« Il urge de protéger les communautés du NOSO, et d’établir les responsabilités dans les crimes commis. De nouvelles exactions ont en effet, selon Human Right Watch, été commises dans les régions anglophones du Cameroun par les séparatistes armés, mais aussi par les forces de sécurité gouvernementales. »
L’injustice comme la justice ne peut pas être sélective. Elle frappe ou profite à tous. On ne peut pas être un bon combattant pour la justice ou contre l’injustice quand on est partisan. L’aurore dont parle le poète Kamto est un doux moment pour tous tyrans et victimes. Le poète véritable c’est celui qui place son combat au-dessus des copains et coquins, au-dessus des disciples. Un combattant pour la justice et contre l’injustice est comme cette dame aux yeux bandes. L’injustice et la justice font souvent bon ménage. Elles logent dans le même sac. Les peuples Tikar en général, Bamiléké en particulier l’ont compris qu’ils ont remis aux rois un sac troue. Il est le symbole de la justice. Tout y entre mais ne reste pas. Tout passe dans ce sac, Un roi véritable ne tronque pas un sac troue par un sac imperméable. A la dame aux yeux bandées j’embrasse mon roi au sac troué.
Voilà la quintessence des sorties de So Koo Shook, roi de Muudjo. Le palais du royaume Muundjo comme celui d’Étoudi n’appartient pas à un groupe d’individus. Ils appartiennent aux peuples. Alors ces palais accueillent tout. Gouvernants et opposants, justice et injustice.
Comme John Fru Ndi, Maurice Kamto a gagné sur le terrain, les élections d’Octobre 2018. Comme Fru Ndi, Kamto s’est vu voler le choix du peuple par une poignée de fonctionnaires véreux. Par principe, l’élu de 2018 doit rester dans sa logique de revendication, quand bien même une cour suprême taillée sur mesure ait fait son choix. Le MRC doit rester dans la logique des revendications pour nous maintenir dans la logique du rêve. L’élu de 2018 et le MRC doivent continuer à être la mauvaise conscience du régime ogre de Yaoundé. C’est à ce prix-là, suivant cette logique la que nous écrirons avec fierté que le pouvoir appartient au peuple.
Mais au-delà de la victoire volée, j’interpelle Maurice Kamto et le MRC et tous les Kamerunais de bonne foi. Nous ne devrons pas avoir peur des mots. C’est l’arbitraire et l’oppression qui frappent ce parti qui a fait naitre l’Etat et les combattants d’Ambazonie. Cet Etat est né dans la coercition. Il est bâti sur des morts sans sépultures, des villages rasés, des déplacés internes et externes. Pour que la fête soit bonne pour tous, que les prisonniers libérés soient aussi ambazoniens, l’Etat ambazonien discute pour un Kamerun nouveau, fédéral comme l’était celui du 1er Octobre 1961. En maintenant la logique de revendications, en reconnaissant de fait l’Etat ambazonien, les combattants pour la justice et la liberté disent aux faucons et prédateurs de Yaoundé qu’un Etat de droit sera forge au Kamerun. On peut etre ambazoniens sans être sécessionnistes. Car l’accident historique que fut Paul Biya nous a permis de fouiller au tréfonds de nous nous en 40 annuité pour comprendre notre ici et maintenant. Cet accident historique m’a plongé en moi-même depuis des décennies pendant lesquelles j’écris pour dire que je suis ambazoniens.
Ambazonien, parce que le Bamboutos faisait partie de Santa. Je suis ambazonien depuis l’âge de 5 ans lorsque fuyant les bombes au napalm de l’armée francaise, j’ai suis la marée humaine aller se réfugier en zone anglophone. Je suis ambazonien parce que mes oncles Victor Ndzondaa et Joseph Fofou, combattants de l’ALNK ont trouve refuge dans les bras de nos freres de BaliKumbat. Je suis ambazonien parce que jeune lycéen à Man O’War Bay, j’ai cotoyé des esprits brillants, cremes de la jeune République Fédérale du Cameroun. Et à Victoria, j’ai vu la marche macabre d’un régime ogre qui avant à grandes bouchées un monde solde, sur de son destin. J’ai le port en eaux profondes de Victoria tuée par un simple decret presidentiel au profit du gouffre à sous qu’est le port de sable de Douala. J’ai vu la République Fédérale du Cameroun rayée de la carte du monde par l’autocrate Ahmadou Ahidjo. J’ai été temoin du passage de la République Unie du Cameroun à la République du Cameroun par la simple volonté du tyranneau Paul Biya. Je suis ambazonien parce que j’ai pris femme du sein des peuples de Mbengwi. Nous avons fait quatre brillantes filles dont deux sont aujourd’hui meres. J’i donc mal quan la route de Mbengwi est le foyer d’incendies criminelles ainsi que d’exécutions extrajudiciaires par un commando d’assassins.
Et parce que le régime confond Ambazonie et sécession, je ne serai pas du macabre jeu. Non, je ne danserai pas sur les têtes décollées, les corps en putréfaction dans les brousses, les bébés nés dans les forêts. Non. Je ne footballerai jamais tant que Ngar-Buh, St Francis massacres continuent à me hanter. Je ne footballerai jamais avec la gâchette posée sur ma nuque.
Gilbert Doho, Cleveland le 25 Décembre 2021.
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